Bernard Clavel (1923-2010), écrivain et conteur hors-pair, nous manque cruellement aujourd’hui. Ce raconteur d’histoires, comme l’étaient Henri Troyat ou Gilbert Cesbron, par exemple, nous enchantait par son art de la narration. Là, où aujourd’hui nos littérateurs sont souvent des professeurs ou journalistes, ceux de jadis avaient exercé de nombreux métiers, de fonctionnaire au départ, il se fit journaliste, apprenti boulanger (La maison des autres),chroniqueur mais aussi « hercule » de foire comme il l’a décrit dans un de ses ouvrages.
J’ai toujours – pour ma part – un immense plaisir à lire et relire cet écrivain jurassien et notamment « Bernard Clavel, qui êtes-vous ? », entretien écrit avec la journaliste Adeline Rivard. Passionnant et instructif à souhait. Lui qui était né dans « une maison sans livres » adorait raconter des histoires : Simplement, lorsque je suis las de marcher, je m’assieds un moment devant une page, et je raconte avec la main au lieu que ce soit avec les lèvres. Il fut un antimilitariste viscéral : Ancien officier, mon oncle avait consacré le plus clair de son existence à se battre pour des frontières. Préserver les nôtres ou les reporter jusqu’au Rhin, en établir d’autres en Afrique ou en Asie, bref guerroyer et se faire trouer la peau pour un trait de carte.
Homme de la terre et des humanités, précurseur aussi, il ne cessait d’affirmer : que le progrès n’est qu’un moyen qu’il doit se soumettre aux hommes et non les soumettre. A l’heure de l’Intelligence Artificielle, il convient de méditer face aux dangers qui menacent désormais l’être humain !
Les messages et les écrits de Bernard Clavel demeurent d’une incroyable lucidité et modernité. Écrivain du labeur et de la vie qui prétendait -fort justement- que l’art est un domaine où l’apprentissage ne s’achève qu’au tombeau.
© Laurent Bayart
- Bernard Clavel, qui êtes-vous ? propos recueillis par Adeline Rivard, Éditions J’ai lu, 1985.
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