JOURS HEUREUX AU JARDIN OU L’HOMME QUI PARLE A SON ARROSOIR

Il y a l’ivresse de l’azur qui vous colorie les pupilles d’un bonheur de nuées, le jardin m’écrit chaque jour une ode à la sérénité de l’instant. Un merle vient me faire la conversation et me donne des nouvelles fraîches du ciel. Tel un complice, un ami, il semble rechercher quelques connivences potagères avec celui qui bêche, outil, stradivarius des besognes de la glèbe. J’aime la plénitude verte, cette harmonie qui pose sa symbiose avec la terre et le cosmos. Ecouter cet infini qui chante et la féconde luxuriance des pommiers, des pêchers et des pruniers où quelques plumes s’étalent, comme des croches de musique sur la grammaire des partitions. Respiration de la nature qui pulse dans les rendez-vous de l’ineffable. 

L’autre jour,  mon épouse a surpris une improbable conversation entre un papa, ou un grand-père, avec son fils, ou petit-fils, passant devant mon jardin: où il est le monsieur ? – C’est lui qui parle à son arrosoir ? Immensément touché et fier de ce « qualificatif », à mettre sur ma carte de visite ? Une feuille de cerisier…

Je suis simplement heureux. Un arrosoir suffit à rassasier la soif qui habite mon âme. Je fais ainsi partie –intrinsèquement – du monde végétal…

Miracle que m’offre mon jardin. Le bénitier d’une conque de feuille recueillant la sueur qui fait pleurer mon corps, de cette divine fatigue qu’on appelle le bonheur.

                                                                        ©  Laurent BAYART

                                                                              6 juin 2022

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