UNE ETOILE DANS LA NUIT / LE JOURNAL D’HELENE BERR.


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       Préfacé par le récent prix Nobel de littérature Patrick Modiano, le journal d’Hélène Berr se présente comme un intense et vibrant témoignage d’une des périodes les plus sombres de notre histoire. Ce journal-récit s’échelonne de 1942 jusqu’au début de l’année 1944. Hélène, juive issue d’une famille aisée (le père est industriel), raconte sa soif de vivre, ses sorties culturelles dans un Paris occupé où elle sent – d’une manière étrangement prémonitoire – la tragédie qui se prépare. Elle exulte d’amour et de passion, ode à la vie et à la beauté des éléments, à contretemps du poids d’une actualité qui écrase les destinées. Elle doit déjà jongler, sinon faire du gymkhana, entre les rafles plus ou moins annoncées. Elle éclate littéralement d’amour pour un jeune homme Jean Morawiecki : « Je lui avais trouvé l’air slave, l’air d’un prince slave ». Il s’engagera dans la résistance pendant que, peu à peu, disparaissent les silhouettes « étoilées » dans la ville lumière étranglée par la peste nazie : «  Il y a du beau mêlé au tragique. Une espèce de resserrement de la beauté au cœur de la laideur »

Outre une indéniable qualité d’écriture, on est impressionné par cette femme romantique qui ose encore s’émouvoir et aimer au milieu d’un chaos qui creuse son effroyable fosse. Ce journal, devenu « texte mythique » qui a été offert au Mémorial de la Shoah, est d’une troublante modernité. Il y décrit cette inexorable montée de l’horreur, les camps d’internement, le « Vel d’hiv’ », les trains à bestiaux, l’humiliation quotidienne de cette étoile cousue aux manteaux : « Ce soir, tout a changé à nouveau : je trouve que c’est une lâcheté de ne pas le faire (la mettre), vis-à-vis de ceux qui le feront ». Ce destin hors du commun nous ouvre la voie et nous exhorte à ne jamais renoncer…Les flammes d’hier n’ont pas encore fait taire leurs braises. D’autres incendies tels des fœtus dorment dans le ventre des dictateurs fous.

                                                                                                                      Laurent BAYART

 * Hélène Berr, journal, préface de Patrick Modiano, Points, éditions Tallandier, 2008

Une réflexion sur « UNE ETOILE DANS LA NUIT / LE JOURNAL D’HELENE BERR. »

  1. Salut Laurent,
    ça fait longtemps … J’espère que tu vas bien et toute ta tribu aussi.
    Le journal évoque un peu celui d’Anne Franck, mais je ne suis pas arrivée à le lire jusqu’au bout. Celui d’A. F., je le lis et relis à des années d’intervales, et j’y découvre toujours de nouvelles choses.
    Mais c’est important que tous ces témoignages existent, de même que les musiques composées dans le ghetto de V.
    Ces derniers 20 ans, il y a eu plusieurs témoignages très bien écrits – à te couper le soufle (non seulement l’actualité, mais la manière de le dire, parfois de le chuchoter). Quand je ferme le livre, je reste souvent en communion profonde avec ceux qui ont eu le courage d’écrire,
    Je t’embrasse et te souhaite plein de bonnes choses,
    Herrad

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