LIVRE / VIOLETTE D’URSO OU (DEJA) UN PETIT PRODIGE DE LITTERATURE.

          Le titre s’avère magnifique, la couverture sublime (œuvre de Félice Casorati), et la photo de l’auteure âgée de 23 ans, Violette d’Urso, énigmatique voire envoûtante. Ce premier livre est tout simplement magistral, voyage dans la profondeur de l’écriture où déjà les mots nous tourneboulent et nous font palpiter. La trame : Anna perd son papa (Luigi d’Urso, décédé d’une crise cardiaque en 2006, à l’âge de 52 ans) très jeune et, adulte, s’en va à sa quête car celui-ci représente, avec sa vie d’aventure(s) et d’aventurier, un personnage romanesque ! Il est réputé un peu dandy, artiste voire excentrique et fascine l’imaginaire de la jeune femme. Fille d’Inès de la Fressange, ancien mannequin français des années 1980, égérie de Chanel, elle travaille aussi pour Karl Lagerfeld, elle lança par la suite sa propre ligne de vêtements. A noter, pour la petite histoire qu’elle a conçu aussi un pilulier pour « l’Élixir de l’Abbé Soury » !

Et voilà qu’elle se pare d’un habit de (fin) limier et s’en va quérir le portrait de cet Italien charmeur, homme d’affaires : Il s’habille comme Mr Banks dans Mary Poppins. Voilà déjà un sacré indice…Plus sérieusement, faisant référence à son pays de naissance : Mon père était italien, et la culture catholique avait toujours été importante chez nous, bien que peu pratiquée. J’aimais l’esthétique chrétienne, les vitraux, la liturgie, les statues de Marie, les cierges, les chants…L’écriture surprend et fascine pour une jeune écrivain de 23 ans qui avoue que ce roman est, en partie- autobiographique. Elle découvre, avec stupéfaction, que le portrait patriarcal ne correspond pas vraiment à la réalité. En effet, cette figure emblématique en forme d’image d’Épinal se révèle être un homme phagocyté par la drogue : C’était dur d’être la fille d’un héroïnomane, mais ça l’était autant d’être la fille d’un héros tout court, d’un homme parfait. Plus loin, la jeune femme lui écrit et confie : Bien sûr, papa, ce n’était pas que la drogue, mais c’est une donnée qui créait du sens et que je n’avais pas. Maintenant je sais qu’il y avait des côtés obscurs, mais je sais aussi que c’était un père aimant. D’autant qu’elle découvrira que son mentor s’acoquinait et côtoyait aussi la mafia… La Sanità…c’était l’un des quartiers les plus contrôlés par la Camorra. On ne pouvait pas y pénétrer en portant un casque de moto car on risquait d’être pris pour un killer…La Sicile, mais surtout Naples sont évoqués : …beauté infinie, chaos infini : des grandes terrasses plus larges que des places d’église, les cheveux volant dans le vent des femmes sur les scooters, derrière leurs maris casqués, l’accent chuintant…Superbe description de cette ville volcanique pour laquelle Violette manie le verbe avec maestria.

De petites pépites de littérature et de mots saupoudrés sur le texte à l’image du parmesan sur des pâtes : Anna, quand on fait des trucs géniaux à 3h38 du matin, est-ce que ça veut dire qu’on a une insomnie ou simplement qu’on aime la nuit ?

Un livre d’amour et de passion, en guise de petite psychothérapie, à l’adresse de ce père si loin et désormais si proche…

                                                               © Laurent BAYART

  • Même le bruit de la nuit a changé , roman de Violette d’Urso, Flammarion, 2023.

4 réflexions sur « LIVRE / VIOLETTE D’URSO OU (DEJA) UN PETIT PRODIGE DE LITTERATURE. »

  1. Nouvel essai Laurent…
    Merciii beaucoup pour ta présentation de ce livre, qui me donne bien envie de le lire.
    Bon WE les amis
    jacqueline

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