BILLET D’HUMEUR/ ACTE 42/ LES CYGNES DU CANAL

 

 

Divers juin

 

                                                                             A Marc Meinau, en cygne amical

( photo de Marc Meinau)

Ce sont les dieux tutélaires, ombres blanches qui glissent et planent sur les eaux moirées du canal de la Marne au Rhin. Ils accompagnent –chaque jour – l’écrivain-cycliste dans ses périples sur la piste cyclable. J’aime observer ces oiseaux palmipèdes, anges-gardiens de l’onde. Ce sont les véritables maîtres des lieux. Ils enveloppent l’espace de leur ouate blanche et leurs plumes font figure de lutrins sur lesquels mes pensées et mes mots vagabondent. J’aime leur présence silencieuse et les ondes bénéfiques qu’ils répandent aux alentours. Emerveillements du partage de l’instant, ces clefs de sol sur l’eau jouent leurs gammes symphoniques sur la ligne droite du canal, comme une partition qu’ils remplissent de leurs notes. Parfois, leurs longs cous en cors de chasse s’égarent sur le goudron de la piste et viennent becquer les cyclistes et autres promeneurs. Autant sur l’eau, nos amis sont des roitelets et des princes, autant sur le goudron, ils s’étalent de tout leur long, pianotent avec leurs palmes sur le sol et, irascibles, deviennent de vrais potentats vous envoyant des coups de bec. Gare à vos guiboles !

Le matin aussi, lorsque je roule sur ma piste, le soleil étant encore derrière les rideaux de l’horizon, je les devine à proximité, dans l’obscurité de l’eau ; boules de coton recroquevillées sur elles-mêmes qui semblent dormir d’un sommeil du juste. Mais ils ne dorment pas, ils veillent…

Les dieux à la blancheur éclatante n’ont pas encore entamé leur journée. Ils sont tels des rêves qui parsèment la nuit déchirée doucement par la lumière de l’aube. Dans une poignée de minutes, les cygnes – nuages en errance dans ce ciel renversé qui se mire sur le miroir de l’eau – raconteront la vie paisible du canal. Une autre histoire recommence, et moi Je ne cesse d’écouter et d’observer ces inépuisables conteurs de l’éphémère bonheur de l’instant.

Scribe et complice, je ne fais que retranscrire les paroles qu’ils ne peuvent pas prononcer. Leur regard bienveillant constitue – en quelque sorte – leur blanc-seing et autre signature qu’ils m’offrent avec tendresse et confiance.

                                                                                                                      Laurent BAYART

 

 

 

 

 

 

 

 

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