LIVRE / ZHU XIAO-MEI OU UN PIANO AU FIL DE LA RIVIERE…

         La Chine occupe actuellement l’actu, par le biais de ce virus qui plombe l’ambiance de la planète, je vous propose de rester dans l’Empire du Milieu, par un autre biais, cette fois-ci, celui de la littérature et de la culture, avec le livre de la pianiste virtuose Zhu Xiao-Mei, devenue une concertiste de renommée internationale. Pour l’heure, celle-ci nous plonge dans la révolution maoïste et les camps de « rééducation » pour intellectuels, bourgeois et autres, que l’on appelait Chushen Bushao, des gens de mauvaise origine. Pas très reluisant tout cela…

Plongé dans La rivière et son secret par le témoignage de Zhu Xiao-Mei, elle nous propose une saga familiale (son père, étant considéré comme un opposant au régime) tout à fait particulière, dans un climat rendu délétère par cette révolution qui pousse les Chinois à la délation (même envers ses parents !) et à des séances de dénonciations et d’autocritiques qui tournent à la flagellation morale mais aussi corporelle. A la maison, s ‘il n’y avait pas de jitai (autel des ancêtres), il se trouvait bien un piano comme un talisman qui la protégera durant toute sa vie. La petite fille de l’époque nous confie : Il n’y a guère que lorsque je joue du piano que je ne me fais pas gronder. Peut-être le son de l’instrument fait-il rêver mon père à une vie meilleure…

Elle racontera, qu’une simple blague, déguisée en tentative de suicide sur un toit, se retournera contre elle et la fera passer pour une séditieuse. On l’enverra – illico – dans un camp de « rééducation », à Zhangjiako, aux frontières de la Mongolie Intérieure, le suicide n’étant pas toléré !

Début d’une vie spartiate, faite d’humiliations quotidiennes où on lui serinera la phrase/marteau : Si vous comprenez, vous devez appliquer. Si vous ne comprenez pas, vous devez appliquer quand même. C’est en appliquant que vous comprendrez. 

La jeune femme rendra un hommage appuyé et tendre à son professeur de piano Pan Yiming dit « Maître Pan ». Après, bien des aléas, Zhu Xia-Mei pourra quitter le pays, via Hong-Kong puis les Etats-Unis où elle s’établira, avant de venir en France. En un an, elle aura changé trente-cinq fois de logement…

Elle s’accomplira par la suite, grâce à sa passion pour la musique et du piano : la Révolution culturelle m’a pris ma jeunesse, à moi et à toute ma génération. Je veux rattraper le temps perdu…Avec pour compagnons de route Bach  (Les Variations Goldberg)et Beethoven. Parfois, le destin prend la poudre d’escampette. Ca s’appelle- tout simplement – la liberté.

                                                           Copyright : Laurent BAYART

La Rivière et son secret, des camps de Mao à Jean-Sébastien Bach : le destin d’une femme d’exception de Zhu Xiao-Mei, Robert Laffont, 2007.

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