BERNARD CLAVEL OU L’HUMANISME DE L’ACTUALITE …

Bernard Clavel (1923-2010) était un conteur et un littérateur hors pair, auteur d’une pléthore d’ouvrages dont j’étais fidèle lecteur. Touche à tout et curieux, il a publié dans de nombreux domaines de la littérature et fait aussi –durant sa vie – presque tous les métiers. Cependant, un livre atypique de son oeuvre m’a été donné de lire récemment, inspiré d’un tableau de Bruegel Le massacre des innocents dans lequel un village flamand est livré à la barbarie de soldats chargés de massacrer tous les enfants nouveau-nés de sexe masculin…

Cet ouvrage, paru en 1970, rend hommage à l’association Terre des hommes et à son fondateur Edmond Kaiser, pharmacien à Lausanne. C’est une ode à l’amour, au respect de l’enfant et un cri contre le nucléaire, décidément l’histoire semble poursuivre sa boucle infernale, jusqu’à se mordre le queue…Bernard Clavel était un humanisme, écrivant avec justesse : Savoir rester un enfant et avoir la force d’un homme, c’est le secret de la réussite. Quelle beauté et lucidité dans ses mots qui nous touchent encore. Et de rajouter : Depuis l’enfance, j’ai toujours eu besoin de guides, et c’est peut-être parce que je ne me suis jamais évadé de l’enfance que je continue sans cesse de les appeler à moi. Merveille de cette littérature qui aime tant l’être humain, Clavel rappelant qu’il y a encore des pays où les hommes savent s’embrasser.

Ce Jurassien était un révolté en constante rébellion face à cet instinct de mort et de destruction dont l’enfance fait toujours les frais. C’est cela, la civilisation : tout avoir à portée de sa main, ne rien avoir à portée de son cœur écrit-il encore. Ces mots résonnent toujours et encore en nous, dans les reflets et les tristes vibrations de l’actualité : Oui, la guerre, c’est la merde. La pire des merdes, le pire des vices, mais qui salit surtout ceux qui en sont responsables. Antimilitariste et pacifiste, il ne cessait de marteler que chaque canon qui sort d’usine, chaque vaisseau de guerre qu’on lance, chaque fusée qu’on tire, signifie –en fin de compte –un vol au détriment de ceux qui ont faim…

Et puis, il nous parle aussi de ce pilote américain : Claude Eartherly qui a lâché la bombe sur Hiroshima…Ce dernier rédige sa correspondance, précisant que ce n’est pas l’homme qui a reçu la bombe qui se plaint, c’est celui qui l’a lancée.Il se fera boucler dans un asile…

Cet ouvrage – qui n’a finalement pas vieilli – est un hymne à l’amour, à la tolérance et à cette enfance que l’on doit constamment aimer et respecter. Il en va de notre humanité et de son avenir.

                                                                                Laurent BAYART

Le massacre des innocents de Bernard Clavel, Editions Robert Laffont, S.A., 1970.

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