LIVRE / « DISPARAITRE » DE LIONEL DUROY OU LES PEREGRINATIONS D’UN CYCLISTE QUI DECIDE DE PARTIR POUR MOURIR UN PEU…

          La présentation de ce livre provoque indéniablement la curiosité du futur lecteur : A l’âge où il est d’usage d’envisager un repos bien mérité, Lionel Duroy a choisi d’enfourcher son vélo et de s’en aller vers ces endroits qui l’ont toujours fasciné : la Roumanie, la Moldavie, la Transnistrie…

L’auteur décide donc de partir, de rouler sans autre projet que de jouir du plaisir d’exister…et de disparaître.  -Pardon ? – Mourir, si vous préférez. Le projet de repartir à soixante-dix ans avait surgi six mois plus tôt, une nuit…L’écrivain rejette l’idée de cette attente de la mort et de cette inexorable idée de décrépitude, d’Ehpad et autres…Il décide partir sur les routes, enfourchant son Alex singer (l’équivalent de « Rolls-Royce » pour les connaisseurs), et pense – dans une certaine mesure – ne plus revenir. Partir pour ne pas jouer le jeu de la décrépitude et de la déchéance devant ses proches. Disparaître et ne pas mourir ! Et le vélo constitue le meilleur antidote à cette idée d’inéluctable déchéance : L’homme qui pédale, comme l’homme qui écrit, n’a plus à se sentir coupable d’exister, il paye sa dette à chaque coup de pédale, à chaque ligne écrite, et moi je fais les deux, écrire et pédaler. La seconde partie du livre nous fixe dans ce voyage où il a bien failli laisser sa peau de bourlingueur sur un bas-côté…Et le pérégrin en chambre à air d’arriver dans le Delta du Danube, lieu magique et préservé, et notamment à Sulina où en 1856, cette ville ne comptait qu’une quarantaine de cabanes rassemblés sur la plage, faites de bois et de roseaux. L’auteur nous parle aussi de cette curieuse Transnistrie (coincée entre la Moldavie et l’Ukraine) pays qui n’existe pas, puisque aucune puissance ne le reconnaît. Elle est comme un trou noir à la surface du globe, et donc le lieu idéal, avais-je supposé, pour quitter discrètement la scène. 

Votre serviteur ayant déjà eu la chance de se rendre à Sulina et dans le Delta du Danube, je me suis régalé à l’évocation de ces lieux : Qui ne connaît pas se perdrait alors dans l’immense labyrinthe du delta, et bientôt à court d’essence, s’enfonçant à pied entre les roseaux…Cité lacustre érigée par Nicolae Ceausescu : Sulina était un exil, une punition…Des chevaux sauvages déambulent avec quelques vaches et des armadas de pélicans et d’échassiers…Un lieu magique et préservé, idéal pour mourir ou disparaître…Mais l’auteur reviendra de son périple, Disparaître et mourir, ce sera pour le prochain voyage !

                                                                            © Laurent BAYART

*Disparaître de Lionel Duroy, Mialet-Barrault Éditeurs, 2022. 

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