LIVRE / LES BOLIDES SUR MER OU L’AVENTURE DE L’EVENT DES GOBES…

          A l’aune de cet hyper événement médiatique qu’est « Le Vendée Globe », un ouvrage d’un navigateur vient mettre un grain (terme marin !) de poussière dans les rouages de cette grande machinerie : Stan Thuret, cinéaste-navigateur, skipper (le dauphin !) professionnel qui a, notamment, participé à plusieurs transats (et ce n’est pas de tout repos !).

Son livre « Réduire la voilure » pourrait presque s’apparenter à un vague (encore un terme marin !) pamphlet si le genre existait encore… Nous voilà partis avec lui dans cette aventure de la navigation extrême où Stan nous fait partager cette vie en mer où la mort est présente à chaque instant, plus proche que sur terre où elle sait se faire oublier. 

Plus en avant, il nous glisse en confident : Naviguer entre les étoiles et le plancton phosphorescent. Glisser sur les vagues qui rattrapent la lune à l’horizon. Mais face à ce déferlement médiatique, et cette course (à l’échalotte) où les navigateurs deviennent des pilotes de bolides flottants, il s’interroge sur le bilan carbone de cette armada de coques devenues des fusées qui glissent sur l’eau, notamment lors d’une conférence de presse pour annoncer cet « événement » : Alors on remplit des voitures et des trains. Nous ne sommes plus à une incohérence près. Plus loin, il en rajoute une couche : La musique commerciale. Le bourdonnement continu de la voix du speaker. Les DJ sur les bateaux. Les soirées privées. La présentation des skippers comme un show télévisé…

Récit passionné et passionnant dans lequel nous apprenons une foule de choses que le commun des mortels ignore, notamment concernant l’alimentation du marin des extrêmes : deux types de plats, lyophilisés ou appertisés. Ces derniers sont cuisinés comme les conserves ou les bocaux. Cette technique tient son nom de Nicolas Appert, qui découvre en 1795 ce procédé de stérilisation. Un peu de culture, les sportmans ! Grâce à cet humaniste des mers, on entre dans ce monde de la course où parfois ces pérégrins en voile tombent sur des Ofni, objets flottants non identifiés…Marrant aussi de découvrir aussi que la plupart des marins souffrent…du mal de mer !

Ce marin, à la recherche de l’essentiel, nous rappelle : Traverser un océan sur un voilier, aller faire ses courses à pied, prendre le vélo pour se rendre au travail : nous devons retrouver la vraie valeur de la distance.

Et de rappeler qu’avec nos voiliers de course à sept cent cinquante mille euros, nous sommes des punks.

Troubadour des océans, il rajoute comme pour enfoncer un clou (dans l’eau ?) : Il faut arrêter avec l’idéologie de la prochaine génération. Celle qui peut agir, c’est celle qui a le pouvoir aujourd’hui, qui a du temps, de l’argent…

Et ce philosophe des mers de rappeler : Magellan met 3 ans en équipage en 1519…/…François Gabart met 42 jours en 2017 en trimaran.

Et à l’heure où l’on nous sermonne avec l’édition 2025 du « Vendée Globe » où l’on nourrit le fantasme du marin solitaire autour du monde. Une course qui use et abuse fièrement du slogan : « En solitaire, sans escale, et sans assistance » …et Stan de rajouter, un rien sarcastique : sans assistance physique serait en réalité la bonne formule…/…l’usage de l’application WhatsApp en mer a explosé…

Suit un lexique explicatif des termes de la marine pour mieux nous familiariser avec ce jargon si particulier. Et, en guise de conclusion, Stan de s’interroger : Mais combien de marins ont pris le temps de se questionner sur leurs motivations ? Combien de marins ont pris le temps de se former pour essayer de comprendre scientifiquement l’océan… ?

Ah en fait, concernant l’édition 2025 du « Vendée Globe » c’est Charlie Dalin qui en est le vainqueur, mais c’est, sans conteste, la jeune navigatrice de 23 ans, Violette d’Orange qui a fait le buzz et restera finalement à jamais dans l’histoire ! 

                                                                    © Laurent BAYART

  • Réduire la voilure de Stan Thuret, récit, Robert Laffont, 2024.

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