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LIVRE / LA REVOLUTION PAR LE GRAND-BI…

 

Somptueuse découverte littéraire que « L’homme au grand-bi » de l’écrivain allemand (né en 1940) qu’est Uwe Timm. Cette petite merveille d’édition est agrémentée d’illustrations savoureuses de Sophia Martineck qui offre à cet ouvrage une esthétique tout à fait remarquable.

L’histoire ravit tous ceux qui aiment la bicyclette (appelée le bicycle bas) – ou plutôt le grand-bi – car cet écrivain singulier nous raconte le grand chamboulement vécu par le village de Cobourg en Bavière lorsque le taxidermiste Schroeder, avant-gardiste inspiré, propose une version moderne de la querelle entre anciens et modernes, en introduisant ce dinosaure haut perché dans les ruelles de son village ! L’écriture se teinte d’humour, de fraicheur et d’un esprit espiègle hors du commun. On y apprend que ce véhicule n’engendre pas la mélancolie et se révèle être véritablement casse-cou : C’est que le conducteur était assis exactement au milieu de la gigantesque roue avant. S’il venait à freiner brutalement, si la descente était trop raide ou s’il y avait un gros caillou sur sa route, il était puissamment soulevé par-dessus la roue avant et précipité à terre, tête en avant…

La révolution est en marche ou plutôt en roue libre…si l’on peut dire. Cette machine infernale étant devenue la source de tous les maux et autres maladies. Des controverses éclatant dans ce « Cloche-merle » à roue où les polémiques enflent comme de la pâte à pain : Ils nous effrayent avec leur sonnette. Ils nous renversent dans la rue. La machine en question compromet notre travail et, pis encore, elle compromet nos femmes. Elle représente donc un danger sur le plan moral.

Enfin, dernier conseil (pour la route) à l’adresse de ceux qui voudraient faire une virée en grand-bi : Emporter des provisions de bouche, un pantalon de rechange et, surtout, une petite pharmacie de voyage…

Laurent BAYART

* L’homme au grand-bi de Uwe Timm (Le Nouvel Attila), 2016.

OMBRES ET LUMIERES D’UN CLOWN CHASSEUR D’ETOILES : COLUCHE.

 Lorsqu’on fait référence aujourd’hui à Coluche, on pense surtout aux restos du cœur et moins à l’humoriste cinglant et caustique, ainsi qu’à l’immense provocateur qu’il fut en lançant sa candidature en 1980 à la présidentielle…Aussi, cette biographie parue en 2011, permet de retracer une existence qui passa « du rire aux larmes » avec cet accident de moto (Putain de camion, dixit Renaud) tragique dont certains y voyaient même un complot…

Le parcours de Michel Colucci, né en 1944, y est ainsi retracé, de « Montrouge à Paris ». Le début de sa carrière et la bande qui écuma les cabarets de Saint Germain, racontés. Les copains avaient pour nom à l’époque :  Romain Bouteille et Patrick Dewaere, sans oublier Miou-Miou. Ce que l’on sait moins, c’est le grand coup de pouce donné par George Moustaki et Jean Ferrat, voire Jacques Brel, à ce jeune débutant qui imitait le cri du cochon au début de ses sketches…

Ascension fulgurante de cet artiste qui –somme toute – avait peu de vocabulaire (il en était un peu complexé) par rapport à son compère intello Romain Bouteille. L’ouvrage évoquera aussi son addiction à l’alcool, à la drogue et son énorme coup de bambou dépressive suite à sa candidature ratée…et les pressions exercées à son encontre par le monde politique.

L’histoire retiendra ce bonhomme génial qui passa de la scène au cinéma avec le succès que l’on connaît, et cette œuvre dont on parle encore tous les jours : les restos du cœur, un combat pour la dignité des plus démunis, qui se poursuit toujours aujourd’hui bien après sa disparition. Une (bonne) œuvre qui dure encore…

Laurent BAYART

 

* « Coluche du rire aux larmes » de Sandro Cassati, City Editions 2011.

 

BILLET D’HUMEUR / ACTE 48 / J’AI FAIT UN REVE, VERSION CYCLE.

 

 J’ai fait un rêve de cycliste. J’ai aperçu – dans la grande noirceur  de ma nuit – de longues pistes cyclables empruntées par tout un chacun, de joyeuses files de bicyclistes arpenter le bitume avec entrain, le sourire aux lèvres. Ainsi, dans mon songe, j’ai vu que ces immenses pistes – à la largeur phénoménale – n’étaient en fait que les anciennes autoroutes, délaissées par les automobiles, afin de les offrir aux déplacements en chambre à air. La gent cycliste a pris enfin le pouvoir sur le goudron ! Et quel sympathique barnum que d’apercevoir sur ces larges routes des cortèges de vélos tous azimuts : vélos de course en carbone, cyclos touristes, électriques, vtt, hybrides, bicycles, draisiennes, tandems, BMX, vélos allongés, vélos de ville, vélos-cargo, de livraison, Fat Byke… Bref, une hétéroclite armada et peloton en kyrielle de couleurs de gens guillerets qui s’en vont en sifflant au boulot ou ailleurs. Incroyable, non ? J’en suis resté pantois. A tomber de la selle.

Par décret, de je ne sais quel gouvernement, le royaume du cycle prenait les rênes (petites reines) des grandes et interminables avenues autoroutières. Quant aux goulots d’étranglement des péages, exit. Démembrés, laissés à la discrétion des distributeurs de boisson (en forme de bidon) et autres barres énergétiques afin d’éviter aux pédaleurs le coup de pompe ou la sorcière aux dents vertes, comme disent les compétiteurs. On a abandonné la litanie des tiroirs caisses pour laisser passer les dérailleurs enjoués. Les automobilistes acariâtres devenant d’accortes et affables cyclistes ! On croit rêver…Justement, si…

Le klaxon d’une voiture me réveille à l’instant d’une sieste improvisée, comme un clou dans un pneu, il me rappelle à la réalité.

Hélas, les autoroutes et autres routes ont toujours des songes d’essence.

Pourtant, j’étais plongé dans un si beau cycle de rêves…

Laurent BAYART

 

RETOUR SUR LE DERNIER FESTIVAL INTERNATIONAL DES CINEMAS D’ASIE DE VESOUL / FOCUS EN INTERIEUR/NUIT.


Encore une fois, la magie a opéré durant cette vingt-troisième édition du Festival International des Cinémas d’Asie de Vesoul, qui s’est déroulée du 7 au 14 février. C’est toujours une surprise et un enchantement d’avoir la capacité de pouvoir « gober » une quarantaine de films durant une petite huitaine de jours, moi qui ne vais pas en « intérieur/nuit » durant tout le reste de l’année… L’esthétique, l’exceptionnelle qualité et l’originalité des films présentés font que ces projections sont des moments d’émerveillements et de rencontres aussi, puisque les réalisateurs ou les acteurs sont souvent présents. Du palmarès établi par les spécialistes et le public, je donnerai un peu le mien. Du moins, mes coups de cœur parmi une production riche et variée où même les documentaires se sont révélés passionnants !

Ma palme d’or irait peut-être à ce film indien : « Hôtel Salvation » de Shubbashish Bhutiani dans lequel il est question d’un vieil homme de 77 ans qui, sentant sa mort venir, se rend à Bénarès dans un hôtel réservé aux personnes qui désirent passer là leurs derniers jours. Le film est somptueux et plein de tendresse. La mort n’étant finalement qu’un rite de passage à l’image du Gange. Je retiens cette belle parole dite par l’un des protagonistes de cette histoire : A quoi sert un chemin s’il ne mène pas à un temple ? D’autres opus remarquables : Baby beside Me (Corée) de Son Tae-Gyum, Going the distance (Japon) de Harumoto Yujiro, un jeune réalisateur sympathique qui a obtenu trois prix à Vesoul…L’histoire d’une indéfectible amitié et fidélité, rare. Her Mother (Japon) de Sato Yoshinori où il est question de la notion de pardon après un meurtre. Le jeu des acteurs est remarquable et la thématique haletante. La visite de la fanfare (Israël) de Eran Kolirin est un classique bien connu. The land of Hope de Sono Sion évoque l’explosion d’une centrale atomique à Nagashima (nom créé en fusionnant ceux de Nagasaki, Hiroshima et Fukushima). Une histoire bouleversante desservie par des acteurs hors-pair. A noter, dans les nombreux films géorgiens, celui de Tenguiz Abouladzé Le repentir, un petit chef d’œuvre qui nous parle des dictateurs avec un humour glacial mais ô combien actuel, cette réalisation datant de 1984, pas de poussière sur la pellicule. L’absurdité ubuesque de la barbarie reste toujours d’une cruelle modernité. A signaler aussi Mandarines de Zaza Urushadzé où est évoqué le conflit qui fit rage en 1992 en Abkhazie. Enfin, dans le rayon des documentaires, mention particulière à Un intouchable (Inde) d’Asil Rais, un homme qui « collecte » les cadavres abandonnés et Le cri interdit (Chine/France) de Marjolaine Grappe où il est question du contrôle des naissances en Chine. Une enquête qui fait froid dans le dos où l’on apprend que l’Empire du Milieu détient un triste record mondial : celui du nombre d’avortement, plus de 30.000 chaque jour…

Bien-sûr, cette liste n’est pas exhaustive. Aucun film n’ayant été qualifié d’ennuyeux. C’est dire la qualité et le millésime offert au public de ce festival. Un public convivial et sympathique où des liens se tissent, au fil des éditions. Public bon enfant et amical, où chacun semble un peu se (re)connaître, loin du snobisme et du mode intellectuel rencontré en Avignon par exemple. Cette manifestation porte – et c’est peut-être aussi sa qualité et sa spécificité – la chaleur des humanités retrouvées et des moments de rencontres. Et, par les temps qui courent, ça fait du bien ! Merci aux réalisateurs : Martine et Jean-Marc Thérouanne et à Bastian Meiresonne, spécialiste passionné, à Nicolas Carrez-Parmentelot, ainsi qu’à la kyrielle de bénévoles sans qui ce festival ne pourrait pas exister. Bravo à tous.

                                                                                                               Laurent BAYART

LIVRE / « LE CRICKET CLUB DES TALIBANS »

 

Timeri N. Murari, vit à Madras, l’un des plus célèbres écrivains indiens, offre-là un récit roman poignant et haletant sur une période sombre de l’histoire de l’Afghanistan. En effet, en 2000, à Kaboul, le gouvernement islamique pose sa chape noire sur une population meurtrie par des années de guerre et d’occupation par les soldats russes (On estime qu’elle laissa derrière elle près d’un million de morts et que cinq millions de personnes se sont réfugiés au Pakistan). Les talibans arrivent et verrouillent les libertés en posant le grillage bleu clair métallique de la burqa sur le visage des femmes… Les sbires de ce totalitarisme absurde affichant même sur les murs de la ville : « La place des femmes est dans la maison ou dans la tombe ». Sans commentaires…

La seule lueur d’espoir, pour les protagonistes de cette histoire, viendra par le biais d’un sport : le cricket, étrangement autorisé, là où tout est interdit, afin de prouver aux opposants de ce régime tortionnaire que le pays est une nation sportive… Le cricket ? Nous n’étions pas une nation athlétique ni sportive. Avec toutes les invasions que nous avions subies au fil des siècles : Alexandre le Grand, Tamerlan, Gengis Khan, les Perses, les Mongols, les Britanniques, les Soviétiques…

Visage obscur de ce chef taliban Zorak Wahidi qui veut prendre pour épouse la belle Rukhsana, journaliste obligée d’arborer une barbe, de se changer en homme (Babur) afin de devenir entraineur d’une improbable équipe de cricket…pour une compétition où le vainqueur pourra partir jouer au Pakistan…Voilà que le sport devient une porte de sortie vers la liberté.

Les talibans débarquaient dans nos vies au volant de leurs véhicules blindés et de leurs Land Cruiser, comme les Sarrasins sur leurs chevaux…

S’ensuit une narration rocambolesque et palpitante où le talent de l’écrivain nous emporte en une narration passionnante dans laquelle la mort rôde à chaque instant. Voyage dans l’absurde de l’horreur. Roman en forme de récit car l’imaginaire n’a besoin –dans ce cas de figure – que d’observer le triste visage (grillagé) de la réalité… Livre incontournable à découvrir comme un témoignage.

                                                                                                                   Laurent BAYART

 

* Le Cricket Club des talibans de Timeri N. Murari, roman traduit par Josette Chicheportiche, bibliothèque étrange, Mecure de France, 2014.

LIVRE / SU TONG OU L’EMBLEMATIQUE LITTERATURE CHINOISE

 

Ca a fait tilt lorsque j’ai pris dans les mains un des (nombreux) ouvrages de Su Tong, auteur emblématique chinois, né en 1963 à Suzhou dont j’avais vu, au Festival des Cinémas d’Asie de Vesoul, le petit chef d’œuvre Epouses et concubines. J’avais ensuite apprécié l’ouvrage Visages fardés qui m’avait aussi subjugué. Voici donc tout naturellement La berge, livre dans lequel Su tong raconte la vie des mariniers et autres bateliers sur la barge de la flottille du tournesol via des existences tourneboulées et une histoire pleine de tohu-bohu.

Destins et lignées portés par les eaux de la rivière des Moineaux, hantée par une martyre de la révolution dont la fin tragique la fit entrer dans la légende. Comme en un récit biblique, son bébé lui survivra à califourchon sur le dos d’une carpe, emmaillotté d’algues dans la litière des eaux du fleuve. Ku Wenxuan devient secrétaire du parti puis, coureur invétéré et faiseur de cocus, il connaîtra la mise au placard et subira les coups de ciseaux vengeurs d’un « raccourcisseur » de quéquettes…

Son fils, le narrateur, Ku Dongliang suivra finalement son père, relégué dans la navigation. Le Garçon surnommé « pet en l’air » sera l’héritier d’une tumultueuse généalogie, déchirée entre l’eau et la terre ferme : les terriens ont le vertige sur les bateaux, et les mariniers sur la terre ferme ! La narration est merveilleusement bien articulée avec des personnages hauts en couleur, aux caractères bien trempés, nés dans les soubresauts de la foudre. Violence, poésie, sexe et humour, mais également tendresse de ce fils déchiré qui sera –au final – l’ange gardien d’un père meurtri : – L’as-tu déjà entendu parler ? – La rivière ne parle pas, papa, tes oreilles te trompent, c’est l’ancre qui frappe la coque.

Un livre magistral que l’on pourrait imaginer porté par les images d’un cinéaste…On y devine aussi les somptueux décors d’une Chine qui fait vibrer les destinées.

Laurent BAYART

* La berge de Su Tong, Bleu de Chine, Gallimard, 2012

CINEMA / J’ME FAIS MON FILM A VESOUL ALORS… V’ASIE !

 

C’est parti pour un « intérieur/nuit » au cinéma Majestic de Vesoul et ce, du 7 au 14 février. Le 23ème Festival International des Cinémas d’Asie déroule son long tapis rouge sur lequel roule son cyclo emblématique. Quatre-vingt-dix films seront à nouveau programmés dont dix-sept inédits. Quelques-uns concourront aux différents prix proposés. Chefs d’œuvres, découvertes, trouvailles, documentaires, films d’animation…Encore un programme somptueux pour cette édition avec les différents prix organisés dont le Cyclo d’Or et un jury de fins connaisseurs. Pour cette édition, un focus particulier sera réservé aux maîtres du cinéma sri lankais. On nous proposera également un « Regard sur le cinéma géorgien », sans oublier le jeune public qui sera gâté avec le zoom particulier de la « Japanimation ». Et puis, la bonne chère et la nourriture seront à l’honneur avec « Le Japon se met à table ». Donc, on vous souhaite un bel appétit, voire une boulimie de films (et je sais de quoi je parle !). Bref, on va encore se régaler grâce aux maîtres queues, à savoir : Martine et Jean-Marc Thérouanne, Nicolas Carrez-Parmentelot et Bastian Meiresonne.

Une cuisine et des mets bien relevés, de quoi satisfaire, une fois de plus, tous les goûts et les palais…des festival(iers) !

Laurent BAYART

 

  • FICA – Festival International des Cinémas d’Asie, du 7 au 14 février 2017. (25, rue du Dr Doillon, 70.000 Vesoul). Tel : 06.84.84.87.46 / vesoul@wanadoo.fr

 

LIVRE / LA CHUTE DE LA FUNAMBULE VERS LE CIEL…

Belle petite trouvaille éditoriale que ce live paru en 2013 chez Zulma dont les couvertures offrent une esthétique tout à fait remarquable (Zulma, vierge-folle hors barrière et d’un sourire (Tristan Corbière)) : « Lucia Antonia, funambule » signé Daniel Morvan. Journaliste à Ouest-France. Cet écrivain a publié quelques romans dont celui-ci – véritable petite merveille – que je découvre aujourd’hui…

Singulière et attachante histoire sous forme de récit, extirpé du carnet de Lucia Antonia, une ancienne trapéziste qui raconte la chute de sa jumelle artiste Arthénice. Saltimbanques de l’ambulatoire qui marchent – en équilibre précaire – sur un « chemin de quatorze millimètres ». L’écriture est somptueuse et les mots dansent au-dessus du vide, en l’occurrence le gouffre de Bramabiau. Son père Alcibiade, fondateur du cirque disant : «  Quel que soit le lieu, le secret des funambules est le même : du danger, de l’espace, du silence ».

Un fil tendu, droit comme le câble d’un i horizontal sur lequel les équilibristes jouent aux chorégraphes. Un peu, comme une métaphore de la vie, les êtres humains en éternelle partance, en quête de cette inévitable chute qui les attend…

Laurent BAYART

Lucia Antonia, funambule de Daniel Morvan, roman, Zulma, 2013.

 

BILLET D’HUMEUR/ ACTE 46 / RESOLUMENT OPTIMISTES !

Devant ce bilboquet et autre capharnaüm de catastrophes annoncées, de cataclysmes tous azimuts, de feux de broussailles vitaminés qui veulent engendrer des incendies atomiques, il faut – coûte que coûte – retrouver les chemins de l’espérance. Etre fou dans ce monde qui se délite où la barbarie devient un peu le marque-page du quotidien. Aller à contre-courant de l’impétuosité du fleuve fou. Aimer plutôt qu’haïr, se prendre l’envie de rencontres et de poignées de mains fraternelles. Voilà peut-être la vraie révolution ? Qui sait. Comme le chante si bien l’auteur-compositeur Jean Humenry « j’vois comme des p’tits miracles » * lorsque les gens se mettent à (se) parler, à siffler dans la rue et à se prendre par les bras. C’est peut-être la seule réponse à apporter à la sauvagerie dans laquelle nous sommes désormais plongés chaque jour. Redevenir l’enfant qui s’émerveille et laisser  l’adulte lassé par trop de friandises et autres sucreries noires…

Espérer, c’est aider le tout petit qui balbutie ses pas, à marcher vers demain. Ne pas oublier que l’être humain doit être un passeur aidant l’autre à traverser la rive. Transmettre, qu’elle magnifique destinée.

Sans bruits, les éveilleurs d’aurore auront toujours une raison d’avance de ne pas sombrer dans la grande noirceur du pessimisme.

C’est peut-être ainsi que l’on pourra changer un peu le monde. Bousculons-le à notre mesure, à notre dimension avant qu’il nous change nous-mêmes.

Nous aurons alors noyé notre sourire dans un visage de glace.

Alors, faisons des habitacles de nos cercueils, de grands cerfs-volants fantaisites, destinés à partir à la conquête du ciel. C’est la meilleure manière et la plus élégante de dire adieu à la terre…

Laurent BAYART

  • « Boucler la boucle », compact-disc de Jean Humenry, Bayard musique, 2016.

LIVRE / QUAND IAN THORPE SE JETTE A L’EAU

 

La natation n’est pas trop ma tasse de thé, normal le chlore ne fait pas bon ménage avec ce breuvage. Bon, trêve de plaisanterie, lorsque j’ai tenu entre les mains cette biographie de ce jeune champion au visage androgyne, un peu à la manière de Bowie, je suis tombé sous le charme d’un athlète singulier.

Ces trois cents pages, d’une édition élégante, racontent, d’août 2011 à juillet 2012, une partie du calendrier et la vie « de l’intérieur » de cet athlète prodigieux qui a quinze ans fut le plus jeune champion du monde de tous les temps, à dix-sept ans, il sera champion olympique…Traqué par les journalistes (il ira résider à Los Angelès afin de fuir la pression médiatique locale), soupçonné de dopage et d’être gay, ce jeune prodige sombre dans le grand bassin de l’alcoolisme et de la dépression (qu’il ne raconte pas dans ce livre). Thorpe nous narre cette existence qu’il passa dans les piscines du monde entier, rendant hommage à ces différents entraineurs : Ashpole, Chris Meyer, Doug Frost, Tracey Menzies, Milt Nems et Gennadi Touretski. En liminaire de cet ouvrage, il confiera : A peine ai-je plongé, mon corps noue un dialogue avec l’eau qui l’entoure, attentif aux forces qu’elle exerce sur lui. Tant que je la laisse faire, elle me guide naturellement vers la position juste, chaque partie de moi placée où il le faut, tête baissée, dans une posture comparable à celle de la méditation.

Jeune retraité, il reprendra toutefois la compétition avant d’arrêter définitivement, – après un come back raté pour participer aux Jeux de Londres -. On aimera l’être humain qui défendra – entre autres – la cause des aborigènes et qui se laissera aller à quelques confidences, comme celle où il compare le Brésil à l’Australie « sans ordre ni loi, où il est plus dangereux de s’arrêter à un carrefour que de griller un feu rouge ».

                                                                                                                   Laurent BAYART

* « Entre les lignes » de Ian Thorpe, éditions Globe, 2016.