Tous les articles par Laurent Bayart

Il N’EST PAS D’HABITUDE NI DE BANALITE EN CHAMBRE A AIR/ BILLET D’HUMEUR / ACTE 13

La rouille de l’habitude n’existe pas pour l’observateur quotidien en chambre à air. Arpenter les pistes et autres bandes cyclables permet – pour celui qui est attentif – d’être émerveillé par des chromos ou petites aquarelles qui sont créés dans l’instantané de l’éphémère. Tous les jours, d’autres détails apparaissent, un peu comme si un trésor dévoilait parcimonieusement ses poussières d’or et autres miettes argentées. Rester la tête dans le guidon serait – à l’instar de ceux qui ont les oreilles obstruées par « des bouchons de musique » – refuser, quelque part, la beauté de l’instant et l’envie de communiquer avec son contemporain…

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Ainsi, chaque jour, de drôles d’aphorismes ou fables sont rédigés devant moi. Il suffit simplement de les lire et de bien vouloir déchiffrer le secret de leur signification. Cocasse parfois, en lisère des champs de maïs près de Lampertheim, d’apercevoir un chien attendant discrètement, campé sur le séant, que son maître ait terminé de satisfaire ses besoins naturels. En général c’est plutôt le contraire ! J’entends encore le bruit d’une pétarade en feux d’artifice, non loin du pont tournant de Vendenheim. Des centaines de corneilles ou corbeaux se propageant, telle une nuée de fourmis volantes, dans le ciel… Et puis, en milieu urbain, surprise du cycliste d’apercevoir tôt le matin des dames de petite vertu aux abords de la place de la Bourse ( ???). L’une me gratifia même d’un signe de la main…Oups ! Je me rappelais que de pareilles dames se trouvaient un jour en pleine cambrousse, aux abords des champs, non loin de Cora…L’hypermarché du charme en quelque sorte moins les caddies… Je pense aussi et surtout à ces inconnus qui me gratifient d’un salut complice ; bonjour qui me réchauffe le cœur, car l’indifférence régnant en souverain sur la bande goudronnée fait que des gens passent aujourd’hui sans prêter la moindre attention à l’autre.

Moi, avec ma bicyclette, j’aime envoyer quelques aubades de bonne humeur à ceux que je croise. Manière d’embellir la banalité du quotidien répétitif qui n’a d’habitude que ce qu’on veut finalement bien lui donner.

                                                                                                                     Laurent BAYART

DES NOUVELLES DE COREE / LIVRE

 

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Encore une belle et heureuse traduction et découverte, celle qui rassemble une petite dizaine de nouvelles d’auteurs contemporains coréens (du sud, cette fois-ci). Séoul, vite, vite ! présente une palette surprenante de jeunes auteurs, un peu la crête d’une vague vivifiante d’une littérature qui gagne à être connue. Grâce soit rendue aux traducteurs Kim Jeong-Yeon et Suzanne Salinas. Ecrivains qui ont vu l’avènement de la consommation et de la démocratie : « l’intérêt des Coréens s’est déplacé vers l’individu en tant que tel, c’est-à-dire envisagé hors de la collectivité…/…pour déboucher sur une exubérante aspiration à la réalisation de soi »

On se délecte de ces histoires magistralement menées qui narrent les aléas d’une vie moderne et trépidante, univers asiatique et d’un pays que l’on ne connaît que trop peu où s’entrechoquent modernité et tradition. Dans ce registre, le texte Le déménagement de Kim Young-Ha est un petit bijou de dérision et va donner lieu à des comportements « irrationnels ». On notera aussi la très belle nouvelle Cours, papa ! qui raconte –non sans humour- la fuite en avant du pater, comme une allégorie de ces Coréens, nés à la fin du XXème siècle et qui se cherchent…Quand viendra l’heure évoque avec tendresse la disparition d’une sœur comédienne et de la lecture de son journal par sa sœur. Le drame du Grand magasin Sampung, immeuble qui s’effondra le 29 juin 1995, devenant un sanctuaire de ruines et gravats pour cinq-cents personnes…L’héroïne racontant comment le hasard lui fit échapper à cette dévastation, la vie –parfois et souvent – ne tient qu’à l’extrême bienveillance de la destinée…

Cette anthologie est une petite perle d’exotisme et une manière d’ouvrir l’huitre d’un pays à découvrir, pour y sentir l’irrésistible iode de l’exotisme.

                                                                                                                      Laurent BAYART

* Séoul, vite, vite ! anthologie de nouvelles coréennes contemporaines traduites par Kim Jeong-Yeon et Suzanne Salinas, Editions Philippe Picquier, 2012.

STEPHEN BLANCHARD : L’INOXYDABLE PLUME !

L’écrivain bourguignon Stephen Blanchard est un infatigable et inoxydable animateur de l’équipée culturelle contemporaine. Fondateur de l’association des Poètes de l’Amitié, sise dans la bonne ville de Dijon, il a mis à flot également la revue littéraire « Florilège » qui sort –ces jours-ci- sont cent cinquante-sixième numéro ! Rare dans la geste éditoriale littéraire.

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Son curriculum est quasiment un inventaire à la Prévert, tant il fourmille de mille et une choses qu’il a réalisées. Syndicaliste, organisateur de manifestations littéraires, d’expositions, de récitals, de lectures, créateur de prix…il foisonne d’activités et d’énergie (dopage ?). Et puis, avec cette incroyable panoplie d’interventions qu’il réalise dans moult (frites !) domaines, on en oublierait presque l’auteur qui se cache derrière l’animateur. Seize recueils de poésie publiés, bon an mal an, qu’il ne cesse de diffuser et parfois de réimprimer. Cet homme de cœur et pluridisciplinaire, fécond à souhait, se révèle être aussi un poète de talent qui manie le langage poétique avec finesse et dextérité.

L’homme d’action, en retraite (??) depuis peu – enchaîne de plus bel : il organise des spectacles littéraires et musicaux, presque soixante-dix par an…Il nous donnerait presque le tournis cet oiseau-là dont les plumes ne sont pas prêtes de se décoller du râble. Au pays du chanoine Kir, notre Icare a mis de la super glu !

Chapeau bas Monsieur Blanchard !

                                                                                                                  Laurent BAYART

« LE BEST-SELLER DE LA RENTREE LITTERAIRE » D’OLIVIER LARIZZA

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 Olivier LARIZZA, pardons Octave Carezza, signe un nouvel opus incendiaire de 228 pages : « Le Best-seller de la rentrée littéraire ». Ne vous fiez pas au gentil toutou qui se trouve en couverture. Galurin de touriste sur le chef, chemise à fleurs et lunette d’intello sur le pif, en train de taper sur le clavier de sa vieille Remington à rouleau. C’est un pitbull lâché au royaume de l’édition ! Notre écrivain nous décrit ses pérégrinations dans le monde des lettres. La parole se lâche en goguette et les citations drolatiques (et véridiques) de ses collègues parsèment l’ouvrage comme on saupoudre du parmesan sur des pâtes italiennes…On se régale, mais ça sent le soufre et le vitriole. Sa plume est rouge lance-flammes et dresse des portraits de ses confrères taillés à la tronçonneuse. Drôles, cocasses, pleins d’esprit, on se régale de ses descriptions et des personnages singuliers qu’il côtoie : éditeurs-poussahs en volutes de cigare, vampes admir-actrices, boutonneux des salons du livre du vendredi, Bernard Pinot-Noir, Houellebecq, Sollers ou l’incontournable Bernard-Henry Lévy qui propose des interventions armées (de stylos), sous couvert de l’ONU, dans la Google valley ! Et puis, il paraît que les écrivains possèdent un taux de suicide au-dessus de la moyenne nationale. Le meilleur remède pour ne pas sombrer dans la dépression, c’est (au final) de dévorer le livre-pamphlet d’Olivier Larizza ! Vous ferez l’économie d’une bonne dépression… de bière sans faux cols (culs !).

                                                                                                               Laurent BAYART

                                        * « Le Best-Seller de la rentrée littéraire » d’Olivier Larizza, éditions Andersen.                            

LAURENT BAYART DANS LA REVUE BOURGUIGNONNE « FLORILEGE ».

 FLORILEGE 156 UNE-pm couvertureQuatre textes inédits (Glisse, Boîtes à lettres, Incuriosité absolue et Porte étroite)  de Laurent BAYART ont été publiés dans le dernier numéro de la revue « Florilège » des Poètes de l’Amitié à Dijon. C’est l’une des plus anciennes publications littéraires et poétiques de France avec 156 numéros parus et un nouveau look qui la rajeunit !

L’ANNIVERSAIRE DE LA BIB DE MUNDO : CINQ ANS DEJA !

 Un petit hommage particulier à la dynamique et sympathique équipe de la bibliothèque de Mundolsheim, lieu de vie et d’échange, de passage et de convivialité dans le village. La culture est un vecteur important de lien social, on ne le répètera jamais assez. Grâce à Céline Hirtz, Claudia Windstein et Brigitte Thomas, entourées par une équipe de bénévoles compétentes et toujours attentionnées, la bibliothèque propose –tout au long de l’année – des animations, expositions et autres rendez-vous dans un espace aéré, confortable et lumineux.

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Cette ancienne école primaire est dotée d’un magnifique préau et d’un jardin coquet à l’arrière, qui lui confèrent un cachet intimiste et chaleureux. Les chiffres témoignent de cet engouement et parlent d’eux-mêmes : 16% des habitants de la commune fréquentent « l’Arbre à lire » ! Un bel arbre qui ouvre ses bras aux lecteurs, comme des branches remplies de feuilles…L’hiver n’est pas prêt d’arriver à Mundolsheim !

bibliothèque@mundolsheim.fr

LIVRE/ VERS LA MAITRISE DE LA TRADUCTION DE CARMEN ANDREI

Et en traductrice, je me vois comme un jardinier amoureux de sa plante, qui a toujours peur que la greffe ne prenne pas, que la plante ne se développe pas nous confie Carmen Andrei qui enseigne la littérature française à l’Université du Bas Danube de Galati en Roumanie. Traductrice auteur de nombreux travaux dans ce domaine, elle vient de faire paraître ce volumineux ouvrage de plus de trois cents pages : « Vers la maîtrise de la traduction littéraire – guide théorique et pratique ». Une impressionnante synthèse qui mêle théorie et exercice empirique en français/roumain. Un ouvrage, à la fois didactique et passionnant. Ce livre, érudit et bien documenté, regorge d’informations intéressantes. Travail soigné et exhaustif qui ne manquera pas de captiver les jeunes pousses et autres vocations de la traduction.

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Carmen Andrei Carmen Andrei part du postulat que la traduction littéraire est une activité créatrice au même titre que la lecture et l’écriture. Toutes trois aiguisent la curiosité intellectuelle qui reste indubitablement une source de plaisir.

Pari réussi : elle a fait œuvre – à part entière – d’acte de création car le traducteur, à l’instar d’un metteur en scène, est lui aussi un auteur car il réinvente son propre jeu d’écriture et sa manière d’appréhender le monde.

                                                                                                                  Laurent BAYART

  • Vers la maîtrise de la traduction littéraire – guide théorique et pratique – de Carmen ANDREI (Galati University Press, 2014). Illustration de couverture de Iarina ANDREI.

(voir le portrait de Carmen Andrei rédigé dans cette rubrique)

SOIREE LITTERAIRE A LA BIBLIOTHEQUE DE MUNDOLSHEIM LE VENDREDI 10 OCTOBRE.

A noter dans vos agendas, Laurent BAYART présentera une nouvelle lecture musicale en compagnie de la comédienne Catherine JAVALOYES et des musiciens de jazz Nicolas MEYER (guitare) et Etienne CREMMEL (trompette). Le spectacle sera suivi du vernissage de l’exposition des sculptures et des peintures de Sylviane BERNARDINI. Un rendez-vous festif à ne pas manquer !

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* Le vendredi 10 octobre 2014 à 20h30 à la bibliothèque municipale de Mundolsheim « L’Arbre à Lire ».

SURPRENANTE DECOUVERTE D’UN ROMAN NORD COREEN

* Des amis de Baek Nam-Ryong, traduit par Patrick Maurus et Yang Jung-Hee, Actes Sud.

Les choses rares sont forcément précieuses, ainsi les infos – autres que celles tamisées (et parfois tronquées) par les feux de l’actualité – sur le quotidien et la vie sociale de la population nord coréenne ne se bousculent pas au portillon.

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Aussi, cette première traduction en France d’un roman venu de la République populaire démocratique de Corée du Nord a attisé ma curiosité. Ce livre : « Des amis » signé par l’écrivain –qui revendique son origine ouvrière- Baek Nam-Ryong (né en 1949) est à tout point de vue remarquable. Qualité d’écriture, excellent rythme narratif et une description de la vie sociétale contemporaine à travers des personnages bien croqués dont les silhouettes pourraient ne pas être inventées… Cet ouvrage traite la question du divorce entre un ouvrier tourneur (et inventeur de machine) dans une fonderie qui se dévoue –corps et âme – à son entreprise Ri Sok-Sun, et sa femme chanteuse Soon Hwi, qui fait partie d’un groupe artistique se produisant dans de nombreuses salles de spectacle. Le lecteur apprend ainsi que dans ce pays, le divorce n’est pas simplement une affaire de couple mais prend des dimensions politiques… En effet, l’ouvrière-artiste sort, peu à peu, de sa condition pour s’envoler dans les hautes sphères d’une certaine forme de vedettariat et d’élitisme au milieu d’un univers populaire et ouvrier…l’une s’élève et l’autre continue sa vie de tâcheron…Débat arbitré par un personnage sympathique et tendre, à l’humanité décalée, le juge Jong Jin-Woo. Une sorte de fin limier psychologue qui joue un rôle d’arbitre au milieu des bris de verre d’une séparation voulue par la femme. L’intrigue est passionnante et le dépaysement garanti.

Les traducteurs écrivant – fort justement – que l’information sur la Corée du Nord peut ne pas provenir uniquement des dénonciateurs qui n’y ont jamais mis les pieds. Bel exercice d’équilibriste car nous avons affaire à un écrivain publiant toujours aujourd’hui chez un éditeur bien connu sur la place, à Pyongyang. L’écrivain prône moins d’héroïsme et plus de réalisme dans les Lettres. Belle prouesse et grisante découverte d’un pays bunker où la littérature a –le temps d’un roman et d’une traduction– entrebâillé la lourde porte de fer…pour nous raconter une surprenante et finalement tendre histoire d’amour…

                                                                                                                    Laurent BAYART

 

BILLET D’HUMEUR / ACTE 12 « LE GRAND SELFIE DU MONDE ».

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Les temps sont à l’étalement des existences. Big Brother n’a vraiment aucun souci à se faire, nos contemporains participent à l’immense vidéo-surveillance qui observe le monde de ses yeux électroniques – à l’insu de leur total plein gré – Pire, ils participent allégrement à ce grand bêtisier qu’est devenue la communication, via ce qu’on appelle pudiquement les « réseaux sociaux ». On twitte, on followe, on tchatche. On fait part de ses humeurs et autres états d’âme au monde entier… Au final, on « s’auto-flique » en livrant les petites infos de nos vies en pâture…Pendant ce temps-là, la vieille voisine de palier d’en face, morte depuis quelques jours, se désagrège dans une odeur pestilentielle. Les rois du facebook avaient oublié de s’inquiéter de son absence et de lui dire tout simplement bonjour, et pourtant sa boite aux lettres (qui n’est pas électronique !) était bourrée de factures et de pubs…On se souvient (pour certains) de la série « Le Prisonnier », toujours suivi par une grande bulle scrutatrice…Déjà, à l’époque, la liberté tronquée étaient évoquée…

Aujourd’hui, dans les rues, marche une peuplade de zombis fixant le creux de leurs mains : ils sont absorbés par les messages qu’ils déchiffrent sur leurs mobiles…leur Ipad ou Iphone…Que sais-je ! Inutile de saluer les quidams que vous croisez, ils ne vous verront même pas…oups…

L’homme – Narcisse n’arrête plus de se mettre en scène avec la civilisation du selfie. Je me prends – moi-même -, au jeu du self-portrait…et ne vois plus la grande barbarie qui ne cesse de ronger le monde et de nous tailler le portrait. Le danger est campé derrière l’oiseau de proie du clic de la photo…

                                                                                                                    Laurent BAYART