Archives de catégorie : Blog-Notes

BILLET D’HUMEUR / ACTE 69 / LES SILENCES DE LA FOULE DES PASSANTS …

Qui habite encore sa présence ? Aujourd’hui, les passants dans les villes ne sont plus que des silhouettes errantes qui pianotent sur la tablette de ces drôles de petits livres qu’on appelle IPhone ou Ipad…Les pages n’émettent plus de bruits lorsqu’on les tourne. Elles meublent le domaine du virtuel numérique. Nous assistons à d’inaudibles chuchotements dans ces bulles de cabines individuelles. Nos contemporains semblent avoir déserté le quotidien pour poser leur absence aux pieds des murs, des cloisons des halls de métro ou des ruelles des cités. Leurs yeux sont vissés sur de petits écrans où défilent images et sms. Dialogues de l’instant qui s’enfoncent dans le sable des connexions éphémères.

Seul au milieu de cette foule de zombis, je me demande comment on a pu en arriver là ? Eprouver de la solitude au milieu d’une foule d’individus qui s’ignorent complètement ? On en rirait presque si cela n’était pas finalement, tout simplement grotesque.

Voilà que j’aperçois même deux amoureux, côte à côte, qui s’échangent un mail laconique, leurs mains scotchées à leur (inséparable) portable au lieu de tenir celle de l’autre…Roméo et Juliette, Tristan et Yseut, Bonnie and Clyde ? Version message électronique. Le désert gagne du terrain…

S’échangent-ils un doux serment d’amour ? Une promesse de mariage ? Leur texto faisant foi. Celle qui –dit-on- sauve ? Un Like à la place d’un baiser ? On aura –décidément – tout vu ou presque, non ?

@ Laurent BAYART

BILLET D’HUMEUR / ACTE 68/ LA LUMIERE COMME LA GRACE D’UN RENDEZ-VOUS…

@ photo de Némorin, alias Erik Vacquier

Après tant d’années, j’aime encore lever les yeux vers le ciel, y déchiffrer quelques sésames d’étincelles afin de poser des poussières d’étoiles sur mon quotidien. Les oiseaux comme des lettres de l’alphabet qui courent dans l’azur.  Quel brouhaha dans cette typographie ! Les nuages sont de gros points gris livrés à l’ivresse d’un grand charivari lorsque le vent a décidé de sortir son ventilateur. Les voilà qu’ils font l’école buissonnière avec leurs visages joufflus et leurs ventres rondelets. 

Me nourrir de ce soleil qui me rend si heureux jour après jour. Enchantement de cette lumière qui pose la fécondité de ses gains sur tous les pores de mon épiderme. Rester avec toi, à chercher Dieu dans l’ivresse de t’aimer et regarder nos ombres s’entremêler dans l’herbe et se perdre à l’horizon. 

Le bonheur est dans l’instant qui prend son temps. 

Dans la seconde qui s’invente des envies de ralenti et qui rend l’horloge muette.

Les aiguilles trotteuses et nos âmes sereines sont toujours à l’heure aux rendez-vous qui ne sont pas encore fixés dans l’agenda.

@ Laurent BAYART

REVUE / NOUVEAU SPORT ET VIE OU UN VIVIER D’INFOS QUI VOUS « MUSCLE » LES NEURONES.

Toujours à l’affût des précieuses infos, news et articles de fond distillés dans cette publication qui traite du sport et de la santé (comme son nom l’indique) d’une manière originale, didactique et souvent interactive, avec les courriers de ses lecteurs qui font avancer souvent certaines idées reçues sur l’un ou l’autre sujet scientifique. En mode vulgarisation qui permet à tout un chacun de comprendre un chouia les enjeux.

Toujours aussi passionnant, le numéro de février nous fait connaître un sport congolais, le nzango, inconnu du quidam, puis nous découvrons un article très intéressant Une expérience de physiologie amusante » qui (dé)montre que l’on peut passer en quelques mois du statut de parfait inactif à celui d’athlète ! Ahurissant. Tout cela en se tapant la course cycliste Race Across America (RAAM), s’agissant de relier le plus vite possible à vélo les deux côtes des Etats-Unis, soit 4850 kilomètres, douze Etats traversés et environ 50.000 mètres de dénivelés positifs…Les experts apprécieront ! L’idée étant de montrer qu’on pouvait entraîner un parfait sédentaire dans l’aventure et le faire participer avec succès. Et puis, on a froid dans le dos en pensant à cette effroyable aventure arrivée à un jeune rugbyman australien de 19 ans, suite à un pari stupide (comme on en a fait souvent dans notre jeunesse !), celui d’ingurgiter une limace…Il contractera une méningite foudroyante après 14 mois de coma pour mourir à l’âge de 28 ans, tétraplégique. Et pour finir dans l’imaginaire, entre poésie et boxe, on se délectera d’un article sur Arthur Cravan alias Fabian Avenarius Lloyd, jeune artiste provocateur qui voua une admiration sans borne à son oncle Oscar Wilde. Dandy-boxeur, était-il un dur ou un tocard ? Cet écrivain – qui fréquenta les milieux dadaïstes de l’époque – entra tout de même dans l’histoire en affrontant Jack Johnson (il prit une sacrée dérouillée !), créant tout de même un mythe autour de sa personne, parlant de la boxe comme d’un prolongement de la poésie ! Ce poète aux gants bourrés de boucles de femmes laissera derrière lui l’empreinte d’un destin hors du commun, d’autant qu’il disparut à jamais au Mexique d’une manière énigmatique…

                                                         @ Laurent BAYART

Sport et vie, numéro 172, janvier/février 2019. Bimestriel.

LIVRE / LES DANSEURS FOUS DE STRASBOURG

Après avoir été subjugué par le livre/sensation de Jean Teulé, Entrez dans la danse, je viens de dévorer ce livre essai et autre récit de John Waller Les danseurs fous de Strasbourg, une épidémie de transe collective en 1518, avec en couverture un détail de l’œuvre Bruegel le Jeune Pèlerinage des épileptiques de Moelenbeek, datant de 1592.

L’auteur, historien de la médecine et professeur à l’université du Michigan, revient sur cet incroyable « délire médiéval » que constitua cet épisode de transe spontanée, décrit à l’époque  par le médecin humaniste Paracelse. Cette frénésie de danse commença le 14 juillet 1518 avec cette femme, entrée dans la postérité (chorégraphique), Frau Troffea qui se mit à danser sans pouvoir s’arrêter et entraina dans sa « ronde » folle de nombreux strasbourgeois. Mais la chronique nous révèle que cette étrange chorémanies’étendit bien avant aussi en Rhénanie à sept reprises…On imputa ce phénomène à un parasite qui se développe sur les épis de seigle humide (l’ergot de seigle), hypothèse farfelue comme d’autres qui avaient été avancées. Imagination, misère, extrême pauvreté, état de délabrement physique et mysticisme religieux font entrer dans cette danse de mort, ode à Saint Guy dont une chapelle est dédiée aux malades sur les hauteurs de Saverne (la grotte de saint Vit) et que des charretées de pèlerins aux pieds fous se mirent à investir, à l’image d’un pèlerinage de Lourdes pour danseurs en déshérence…

L’auteur, avec une abondance documentaire, nous explique que tout cela n’est pas le fait du hasard mais n’est qu’une suite logique d’autres événements remarquables dont cette tarentelle que l’on dansait en Italie afin de guérir les morsures de la…tarentule, cette grosse araignée passée dans la postérité grâce à la danse !

Au final, l’auteur met cette chorémanie sur une situation de grave détresse psychologique, liée à la malnutrition et à des régimes faibles en minéraux susceptibles de perturber la production d’un neurotransmetteur comme la sérotonine. Et de conclure, d’une manière surprenante, que si ces ancestrales croyances sont devenues obsolètes, ces phénomènes se sont mués au XXI ième siècle,  dans une société contemporaine bien cartésienne où de jeunes danseurs – psychotropes aidant – se mettent à trépigner des pieds durant des nuits et des jours, lors de Rave party, Flashmob ou autre clubbing (boite de nuit)les sonos et les amplis ayant pris la place des peurs moyenâgeuses et du châtiment divin…

@ Laurent BAYART

Les danseurs fous de Strasbourg, une épidémie de transe collective en 1518 de John Waller,La Nuée Bleue, 2016.

BILLET D’HUMEUR / ACTE 67 /RACISME/ VIOLENCE OU LORSQUE LA NAUSEE ABONDE…

C’est un lieu commun d’affirmer que le monde marche sur le crâne et même sur des clous de fakir ! Depuis des semaines, des mois et même quelques années, on assiste à une banalisation de la violence et d’une haine tous azimuts qui se propagent telle une trainée de poudre… Jadis, les racistes agissaient (et agissent souvent encore) dans l’ombre, la nuit et l’obscurité en taguant ou dégradant des sépultures, mais aujourd’hui, on bascule dans l’abjection en plein jour et – qui plus est – devant les caméras et à la vue de tout un chacun ! On apostrophe des êtres humains, leur jette l’anathème parce qu’ils sont de confessions Juives mais aussi Chrétiennes et Musulmanes. L’histoire ne serait donc finalement qu’un éternel recommencement ? Une boîte à pogroms ? Un feu de la Saint Jean pour autodafés? A quoi servent tous ces livres d’histoire, ces plaques commémoratives, ces mémoriaux aux gerbes fleuries, ces actions éducatives dans les écoles, ces journées du souvenir et ces sermons que l’on assène aux jeunes générations  à longueur de journées: plus jamais ça…et pourtant ? Pour en arriver là ?

Comme si le passé n’était qu’un requiem d’éternel recommencement. La peste de la haine rouvre ses cahiers, presque, comme si de rien n’était ! Et son écriture noire macule les feuillets de ses taches qui se déversent comme des nappes de fioul dans un océan bleuté. 

Nous étions faits pour être libres / Nous étions faits pour être heureux/ comme la vitre pour le givre/ et les vêpres pour les aveux…écrivait Louis Aragon.

On en appelle toujours au sursaut, à la dignité, à retrouver ce goût et cette envie de l’autre. Et pourtant, on sait très bien où mène l’incandescence des braises attisées par un vent fou…Manifester son indignation et basta, on retourne aux affaires courantes ! Comme si de rien n’était. Trop beau et trop facile.

Le monde devenu pétaudière. Qui donc posera ses mains de prophète pour apaiser les flammes avant que les cendres ne se déversent sur nos existences, comme une encre qui aurait mal tournée dans un porte-plume ? Qui pour écrire des mots d’amour et de paix sur ces mêmes cahiers, les seuls capables d’éteindre les incendies ? Le monde a soif de cette eau-là. La seule qui puisse nous rassasier. Le reste n’est que de l’essence…

                                                                                @ Laurent Bayart

                                                                                    23 février 2019

FICA 2019/ DES SOURIRES EN CINEMAS D’ASIE SUR VESOUL

Martine et Jean-Marc Thérouanne, vingt-cinq ans de passion partagée.

Toc toc toc. Presque les trois coups de balai sur le plancher  en bois comme pour le théâtre. Et, c’est parti pour un « intérieur/nuit » d’une bonne semaine. Vesoul nous affrète ses plus beaux atours, sourires en travelling et plan large. L’Asie va faire son cinéma dans les salles obscures du Majestic et semer ses pellicules étoilées dans les rues, les murs, officines, vitrines et sur les bus vésuliens. La Motte marche en Sabot telle une princesse des mille et une nuits. Le conte de fée peut commencer. La Haute-Saône se transforme en steppes eurasiennes et en fabuleux caravansérail. Histoire de faire de chaque spectateur un aventurier de la route de la Soie. Merveille des cinémas venus d’ailleurs qui nous éblouissent et nous émerveillent en version originale et sous-titrée.  Quelques (petites) heures encore à patienter et le générique de l’édition 2019 du Festival International des Cinémas d’Asie de Vesoul va retentir sous les lambris du théâtre Edwige Feuillère. C’est Hollywood en plus chaleureux, convivial et sans smoking, ni manière.

Une façon d’humanité retrouvée. Vingt-cinq ans, un quart de siècle et la passion qui pose ses majuscules sur l’écran blanc que les bobines et les projecteurs vont transformer en palette de couleurs qui bougent à la vitesse de la lumière ou presque…

                                                                               @ Laurent BAYART

  • 25èmeFestival International des Cinémas d’Asie de Vesoul, du 5 au 12 février 2019. 
  • www.cinemas-asie.com

VOYAGE EN FICASIE A VESOUL, LA CAPITALE DU FESTIVAL DU FILM ASIATIQUE, EN NOCES D’ARGENT.

Et nous revoilà replongés en « intérieur/nuit » dans cette capitale asiatique qu’est devenue Vesoul en Haute-Saône. La 25ème édition du Festival International des Cinémas d’Asie de Vesoul va étaler son long tapis noir de pellicules, à l’image de celui tout en rouge de Cannes, du 5 au 12 février. En moins snob et no smoking.

Rendez-vous devenu incontournable, chaleureux, convivial et truffé de pépites cinématographiques.  Cet événement, dédié au septième art asiatique, pose la virgule de son sourire sur la bobine des festivaliers, ravis de revenir chaque année se plonger dans la nuit magique de cet événement majestueux ou plutôt Majestic ! Somptueux cinémas qui déroulent la romance de leurs images en version sous-titrée. Voyages au long cours dans les paysages époustouflants de l’Eurasie, aux confins de l’imaginaire. Voilà que chaque spectateur est convié à faire sa propre route de la soie. Caravansérail en technicolor. Il en faut des trésors de passion, de patience, de curiosité et de rencontres pour présenter autant de productions en un quart de siècle : 1 600 films, 600 000 spectateurs et 550 réalisateurs, acteurs, producteurs et journaliers du cinéma. C’est finalement tout un continent qui se trouve représenté au pied de la Motte (pas la Grande !) et du Sabot. Une ivresse de plaisir à faire la queue à la lisière des salles, à papoter et se raconter le film précédent, à consulter son programme et à piaffer d’impatience dans l’attente d’aller découvrir le prochain bijou. Faisant fi des pop corn, on dégustera –en couleur locale-, qu’on se le dise, des rouleaux de printemps !

Le ticket aussitôt déchiré par le contrôleur-bénévole, vous pourrez pénétrer dans la salle en gradins, comme on franchit une guérite de douane. Vous voilà déjà dans un autre pays ! Venez vous asseoir dans les confortables fauteuils rouges du multiplex. Petite causerie avec le réalisateur, carnet de note et traduction instantanée. Présentation enflammée, pleine d’humour et d’érudition du spécialiste Bastian Meiresonne qui adresse son mythique et tonitruant « Bonjour Vesoul ! », et on lance le film. C’est parti pour le générique et sa musique…

Le monde est si beau lorsqu’il nous fait son cinéma. Et cela fait 25 ans d’amour en noces argentées.  Tant de fidélité méritait bien un bel hommage. Celui rendu au couple fondateur Martine et Jean-Marc Thérouanne qui ont mis l’Asie et son art cinématographique à portée de doigts, comme une alliance…V’Asie ! Aurait chuchoté Roméo à Juliette…en chinois, persan ou coréen ?

@ Laurent BAYART

  • 25 ème Festival International des Cinémas d’Asie de Vesoul, du 5 au 12 février 2019.
  • www.cinémas-asie.com

LIVRE A METTRE ABSOLUMENT AU PANTHEON DE LA LITTERATURE VELOCIPEDISTE : LA BURLESQUE EQUIPEE DU CYCLISTE DE H.G. WELLS.

Paru en 1906, ce livre du génial écrivain Herbert George Wells (La guerre des mondes, L’homme invisible…) est un petit bijou de littérature cycliste, mais pas que…

Je viens de lire avec ravissement et enchantement La burlesque équipée du cycliste qui nous emmène dans une entame de siècle où l’on découvrait alors les vertus de cette petite reine, devenue moyen de communication et de rencontres (amoureuses), permettant aussi aux classes ouvrières de s’émanciper et de prendre l’air sur les routes anglaises. On se souvient du livre référence Voici des ailes de Maurice Leblanc dont on a tant vanté les mérites, mais cet ouvrage-là, à mon sens, est une véritable pépite, un braquet bien supérieur pour employer un terme cycliste.

 Cette comédie guillerette raconte les aventures rocambolesques et picaresques de Hoopdriver,  jeune employé de tissu londonien  qui va prendre quelques jours de congés afin d’aller goûter à la grande aventure d’une randonnée cycliste sur la Southern Coast.

Et voilà notre Don Quichotte en chambre à air, gauche et maladroit, (roi de la gamelle !) partant à l’aventure malgré un nombre incalculable de blessures aux genoux et de « chromes » sur l’épiderme. Son tube d’arnica sera une manière de faire foi du cachet de la poste ! Coup de foudre, à défaut d’un coup de pompe, à la vue de cette « jeune dame en gris », la susnommée Jessie, mineure enlevée par un chevalier à la triste figure de son aristocrate famille. Notre petit employé se transforme en justicier, chevalier et limier à la manière d’un Sherlock Holmes en chambre à air. La bicyclette lui permettra d’aller au-delà de sa petite condition et de se métamorphoser !

Incroyable fantaisie et drôlerie dans cette écriture pleine d’allant et de bonne humeur.

Belle histoire d’amour aussi sur fond de paysages pittoresques et rencontre impromptue d’une jeune bourgeoise avec un petit ouvrier. Révélation de deux mondes qui se percutent. Et, comme toute (belle) histoire à une fin, chacun  regagnera son monde, mais la jeune fille glissera ce sage conseil à son preux bicycliste : Travaillez. Cessez de baguenauder avec la vie. Vous avez prouvé que vous êtes doué de courage, de volonté. Mettez-vous à l’œuvre.

Il y a des rencontres (en bicyclette) qui changent les destins…

                                                                                       @ Laurent Bayart

* La burlesque équipée du cycliste de H.G. Wells, Folio, 1984.

IDISS, L’EMOUVANT HOMMAGE DE ROBERT BADINTER A SA GRAND-MERE.

I

Récit d’un singulier destin d’une femme et famille juives qui émigrèrent, de l’ancien empire russe de Bessarabie, dans la France des Lumières, fuyant la révolution russe et les pogroms de Kichinev. Née en 1863 dans ce qu’on appelait alors le Yiddishland, à la frontière occidentale de l’empire russe, devenu ensuite territoire roumain. Idiss vivait alors dans ce qu’on surnommait un shtetels, village peuplé de juifs dans la Russie tsariste. Epoque où l’on parlait le yiddish sur un territoire qui recouvrait la Lituanie, la Pologne, l’Ukraine, la Hongrie et la Roumanie,  rassemblant une diaspora de onze millions de juifs unis par cette même langue.

Emouvant ce livre avec en couverture la photo sépia en médaillon d’Idiss, la grand-mère maternelle de Robert Badinter, ancien ministre de la justice et ex-président du Conseil constitutionnel, qui rend ainsi un vibrant hommage à cette femme au destin singulier, mais aussi à un peuple inexorablement persécuté.

C’est ainsi qu’avec tendresse Robert Badinter dresse le portrait de cette femme qui – pour subvenir aux besoins de sa famille – fut contrebandière (de tabac !) bien malgré elle. Il raconte leur installation à Paris, puis à Fontenay-sous-Bois et Nantes, son père Simon devenant négociant de fourrure. Aléas de cette famille d’émigrés qui prend bien vite la mesure de la vie parisienne. La France est alors une terre d’accueil. Les anciens Russes s’intègrent parfaitement et sont reconnus « citoyens français de confession israélite », montrant par là qu’ils étaient des Français, « juifs seulement par leur religion ». Bonheur fugace de l’entre-deux guerres où les bruits de bottes commencent à nouveau à se faire entendre dans cette Europe qui concocte l’un de ses plus grands carnages. Brouhaha de l’histoire qui s’emballe avec l’Occupation allemande et les lois et décrets du gouvernement de Vichy à l’encontre des Juifs (dont la liste figurera en fin de volume). Son père et son oncle Naftoul seront déportés, comme tant d’autres, et ne reviendront jamais…

Ce récit poignant retrace une époque étranglée qui –hélas – ressemble un peu à celle qui se déroule aujourd’hui sous nos yeux, avec les montées de l’intolérance, des nationalismes et des actes de xénophobie. L’histoire serait-elle donc toujours un éternel recommencement ?

Le bonheur, une fine pellicule de papier que l’on froisse et déchire si vite…Les livres ne sont-ils fait que pour brûler ?

@ Laurent BAYART

* Idiss de Robert Badinter, éditions Fayard, 2018.

HORS SERIE SPORT & VIE/ LA DANSE COMME ON N’EN PARLE JAMAIS.

 

Le dernier hors série du magazine Sport & Vie est tout simplement passionnant, dédié entièrement à la pratique de la danse, il sort totalement des sentiers battus pour nous emmener faire du « hors piste » !

On sait que depuis des temps immémoriaux, les êtres humains dansent comme si cette activité était indispensable à leur survie, et plus loin d’affirmer : Les êtres humains sont nés pour courir, disions-nous plus haut. Et s’ils étaient aussi nés pour danser ?  En effet, la danse se révèle être un langage de communication qui ne trompe pas, à l’inverse de la parole : La musique et le chant visent moins à transmettre des idées ou des messages que des affects et des émotions qu’on peut lire sur le visage des gens. De plus, elle permettrait de maintenir une cohésion de groupe, une osmose entre les individus. Bref, une  véritable communion sociale.

 Ce numéro traite de nombreux aspects de la danse, des thèmes passés souvent sous silence. Si le grand public est bien au courant des dérives liées à l’anorexie, il connaît moins les confondantes pratiques du dopage à faire pâlir cyclistes ou rugbymen ! Et là, on tombe littéralement sur les fesses ! (Loupée la réception !) Car ceux qu’on surnomme les athlètes de Dieu sont gavés aux stimulants, diurétiques, amphétamines, stéroïdes et drogues récréatives. Bref, c’est plutôt le pandémonium !  Cocaïne et cortisone permettent aussi de palier aux innombrables blessures engendrées par la pratique de la danse. Les compagnies de ballet professionnel rapportent un  taux de blessures annuel de 67 à 95% !La danse s’affirme donc comme une pratique sportive qui nécessite un entraînement de spartiate. En danse, on doit savoir quelle image on propulse dans l’espace, à chaque instant,ce qui différencie avec la pratique sportive du compétiteur dont seul le résultat du tableau d’affichage compte.

On y apprend que Cuba est l’endroit au monde où l’on danse le plus, que la Russie est une terre de danse grâce à Pierre le Grand, fondateur de Saint-Pétersbourg, puis de l’impératrice Catherine II qui lança la construction du Bolchoï (qui signifie grand théâtre) et Strasbourg, la ville où une épidémie de danse a rendu fou (lire Jean Teulé Entrez dans la danse).

Cette revue nous fait entrer de plain-pied dans la chorégraphie, sous la gouverne de son saint patron,  Saint Guy…On achève bien les chevaux !

                                                                                                              @ Laurent BAYART

* Sport & Vie, hors-série numéro 49 « La danse comme on n’en parle jamais ». 7,50 Euros.