Archives de catégorie : Blog-Notes

BILLET D’HUMEUR / ACTE 160/ CAS CONTACT OU L’EFFET QUEUE LEU LEU EN BOULE DE NEIGE.

En effets boules de neige, je te vois toi, tu me vois toi, on se voit et se croise. On aborde un quidam avec sa dame et en plus un inconnu qui lui même a côtoyé un autre inconnu, et c’est ainsi, la danse de la queue leu leu où tout le monde porte le masque qu’on ne voit même plus la grimace qu’il vous fait…Pis, quelques jours après, on apprend (par le téléphone arabe ou sarrasin) que l’une des personnes a choppé le virus du fameux Corona…Oups. Alors là, branle-bas-de-combat, vous v’là t’y pas considéré comme un cas à part, ou plutôt un cas contact/ caca contact ! T’avais… cas faire attention aux postillons ! Vous scrutez toutes les personnes abordées. Votre calepin est scanné/analysé ! Vous v’là désolé d’être isolé, mis en quarantaine.  Et tout est dépeuplé…

On retient son souffle (dans les poumons) en attendant les résultats du test ! Une paille enfoncée dans le nez et c’est fait !

Ouf, le virus ne vous a pas transformé en cactus ! Vous êtes sain et sauf.

Quel monde qui vous oxyde de trouille où chaque rencontre constitue désormais un risque ! C’est la victoire du solitaire sur le bambocheur !

Où dorénavant, pour vivre heureux, sortez de la meute et ne restez pas groupé…

Autrement dit, selon l’adage : Mieux vaut être seul que mal entouré ! 

Sale temps pour les humanistes…

                                                                   © Laurent BAYART

                                                                       28 mars 2021

BILLET D’HUMEUR / ACTE 159/ IMMUNOGLOBULINES EN PETITES BULLES DE VIE.

                                                                                          A Claudia,

Immunoglobulines, j’ai mis du temps à réussir à prononcer ce mot tortueux, distillées aux comptes (contes ?) gouttes, perchées sur ce porte-manteau à perfusion dans cette petite bouteille renversée qui égrène, telle une clepsydre, son langoureux lamento à rebours des gouttelettes salvatrices. Il ne s’agit pas là, de comptabiliser le temps qui s’écoule avec des grains de sable, mais de vous fertiliser en gouttes hyper vitaminées qui pénètrent dans votre corps par la porte d’une veine…

Les scientifiques définissent ce nectar comme des globulines du plasma jouant le rôle d’anticorps et dotée de propriétés immunitaires. L’immunoglobuline prenant la forme d’une glycoprotéine soluble ou membranaire… Vous m’en direz tant ! Nous voilà donc, à glisser dans la littérature de la grande pharmacopée et du monde médical de la blouse blanche. Hermétique poésie des disciples d’Esculape.

Me voilà, à me repaître et me régaler régulièrement de ces immunoglobulines qui font chanter à nouveau mon corps et me « réparent » doucement…

Ces gouttelettes sont une ode à l’instant qui s’écoule doucement et graduellement. 

Une poésie liquide que je goûte à goutte et qui monte doucement jusqu’au delta de mon esprit pour prendre la forme d’un galet de texte en prose.

Immuno-littérature.

                                                                   © Laurent BAYART

                                                                                24 mars 2021

BILLET D’HUMEUR / ACTE 158 / J’AI LA TETE DANS LES NUAGES.

La tête dans les nuages en un  désir de ciel bleu. Envie d’écrire et de fixer des mots sur cette feuille azuréenne. Littérature de voyage. Littérature volage. M’évader dans les silences de l’instant. Echappée belle sur la crête d’un cumulus comme une bulle de savon ou une éponge de coton. Des oiseaux en porte-plume volant, passent devant ma fenêtre et dessinent un ballet de circonvolutions en batifolant avec le vent. Jeu de marelle à la craie de cirrostratus sur le goudron des nuées. Peut-être y percevrai-je Jonathan Livingston le goéland ? Une cigogne à la recherche d’un nid sur le clocher d’un village ? Ou quelques oiseaux fous se prenant pour des avions à réaction ?

Je me nourris de ce ciel qui m’offre sa sérénité bleue.

Ma tête se trouve dans les nuages. Je suis ivre de bulles d’oxygène. 

Et, n’allez pas chercher le soleil, je l’ai volé pour le fixer dans la grande penderie de mon cœur !

J’ai chaud de tant aimer le monde à ma fenêtre…

                                                                         ©   Laurent BAYART

                                                                             21 mars 2021

QUAND ON PERD UN CHAT, ON PERD UN AMI FIDELE OU LE ROI ARTHUR S’EN EST ALLE…

                                                                    A Marie, sa maîtresse.

          Par l’invisible chatière de la porte des étoiles, tu es parti aujourd’hui dans ce qu’on appelle le monde d’à côté, dans l’imperceptible présence de ceux que l’on a aimé. Arthur, le bien nommé chat, qui a dû mettre un point final à sa petite vie heureuse de matou de sofa, laissant ta maîtresse attristée de perdre un si fidèle ami et compagnon. Tu t’en es allé, non sans laisser un bouquet de ronronnements d’amour tels des chrysanthèmes, même quelques instants avant de mourir, car tu aimais et tu étais aimé, toujours entouré d’enfants et d’adultes. Tutur a pris la poudre d’escampette, bien malgré lui, mais il en est ainsi aussi des humains, rattrapés par la maladie. Nul n’est épargné. Quelques larmes aujourd’hui comme une lettre de départ que l’on laisse sur un meuble ou sur le bois d’un bureau. Post-it liquide de nos yeux en pleurs.

Je ne suis pas parti, je reste encore là  à me lover dans tes jambes et à quémander quelques affectueuses caresses. Tu n’entendras plus la chaudière de mes ronronnements, ne percevras plus mes coups de tête/butoir pour me faire cajoler, Marie, et pourtant je suis toujours présent à tes côtés ! Il en est ainsi des êtres humains qui se sont éclipsés, alors pourquoi nos amis à quatre pattes, fidèles parmi les fidèles, ne continueraient-ils pas d’habiter les lieux où nous fûmes heureux ensemble ?

Arthur, Adieu, ta place sur le canapé est vide mais l’on sent déjà que tu t’es installé confortablement. La mort n’existe que lorsqu’on oublie les êtres, humains ou animaux, que l’on a tant chéris. L’amour est toujours plus fort que l’absence.

La mort est un coup de griffe qui laisse une blessure que l’amour guérit avec le temps qui passe langoureusement, comme se déplace un chat.

Tes vibrisses sont désormais des étoiles dans le ciel de nos nuits.

                                                                           © Laurent BAYART

                                                                                18 mars 2021

LIVRE / IMPOSSIBLE N’EST PAS…ERRI DE LUCA OU LA MORT EN MONTAGNE.

         Je pensais d’abord avoir affaire à un ouvrage/récit d’un aventurier des cimes, mais à la lecture, je m’aperçois qu’il se situe plutôt dans la rubrique « policier ».  L’auteur que je ne connaissais pas : Erri De Luca, écrivain italien, poète et traducteur, nous entraîne dans un récit passionnant où le dialogue est finement mené, mêlant psychologie, intrigue et enquête, entre un jeune magistrat et un ancien révolutionnaire/terroriste. Découverte de cet ouvrage intitulé « Impossible » avec une superbe photo des Dolomites. On y parle montagne mais aussi d’un sombre meurtre perpétré sur les hauteurs des sentes caillouteuses. 

Un homme chute dans le vide. Derrière lui, un autre homme donne l’alerte. Mais, il s’avère que ne sont pas des inconnus, car les deux « promeneurs » s’étaient connus dans un groupuscule révolutionnaire quarante ans plus tôt… Improbable hasard ? Préméditation sinistre ? Vengeance après une pernicieuse trahison ?

L’écriture est somptueuse, le magistrat tenaille le « présumé coupable » en une narration qui se déroule dans un paysage époustouflant, à la fois humain et naturel. Aller en montagne, grimper, escalader, est un effort béni par l’inutile. Et plus loin : La peur est utile. C’est d’ailleurs une forme de respect et même de révérence due à l’immensité du lieu qu’on traverse…Deux typographies différentes, comme deux dialogues serrés et palpitants. Et ces lettres à Ammoremio, confidences épistolaires. 

La conversation  (interrogatoire en forme de débat) telle une amicale connivence et la recherche lancinante de la vérité qui fuit. Le limier « cuisine » élégamment le suspect. Vous vous trompez sur le passé, il ne reste pas intact. Le temps est une lèpre qui le fait tomber par petits bouts…

La véracité des événements, quant à elle, restera en suspend et c’est toute la beauté de ce livre atypique avec cet étrange affect entre les deux « belligérants » : En aucune occasion, vous et moi ne reviendrons sur cette histoire. – Pas même en montagne ? S’il nous arrive d’y aller ensemble, puisque c’est vous qui m’avez conseillé l’alpinisme ?

La montagne offre le silence de la sérénité qui bâillonne parfois la destinée de mystérieux alpinistes bourlingueurs, en mal de vérité comme un inatteignable sommet…

                                                           Copyright : Laurent BAYART

Impossible de Erri de Luca, roman, Gallimard, 2020.

LIVRE / UN HOSANNA SANS FIN OU LES VIES INFINIES DE JEAN D’ORMESSON.

         Passé de l’autre côté du miroir depuis décembre 2017, Jean d’Ormesson ne cesse de continuer à nous parler de son enchantement et autre amour de cette vie qui l’a tant comblé. Il revient, aujourd’hui, avec ce petit opus publié par sa fille Héloïse, Un hosanna sans fin, manuscrit qu’il a terminé avant de s’éclipser mais n’a pas eu loisirs de relire. Et l’éditrice de préciser : Mon père écrivait à l’ancienne, à la main. Il ne possédait ni ordinateur ni machine à écrire. Un peu comme le faisait Bernard Clavel, Guy des Cars ou bien Henri Troyat qui rédigeait ses textes sur un lutrin et debout !

Dans ce livre composé par petites touches de textes, comme des chroniques, manière de poésie teintée de philosophie, il s’interroge sur le sens de nos existences et de nos destinées : Autant que toute mort, et peut-être plus encore, toute naissance est une énigme. On déguste cette prose plus qu’on ne la lit. Merveilleuse littérature de la bonté et de la bienveillance qui enchante le lecteur par cette soif d’absolu où il effleure toutes les interrogations existentielles du pourquoi de notre cheminement. Entre naissance et mort, il ne cesse de s’interroger sur la panacée de la science qui aurait réponse à tout : Très capable d’apaiser notre curiosité, elle est incapable d’apaiser notre angoisse.

Ivresse d’écouter parler et chuchoter cet homme apaisé et serein qui ose se tourner vers la foi : Croire est une grande chance. La foi est un bonheur. Plus puissante encore que la pensée, elle soulève les montagnes.

On ne se lasse pas de lire et de relire cet écrivain dont la voix traverse la fine cloison de l’absence pour faire sourire l’infini.

                                                                        © Laurent BAYART

Un hosanna sans fin de Jean d’Ormesson, éditions Héloïse d’Ormesson, 2018.

BILLET D’HUMEUR / ACTE 157 / ALPHONSE EN…TRAIN DE LIRE!

                                                        Pour Alphonse, l’aficionado des trains.

         Parmi la pléthore de livres qui sont tapis…sur le sol ou plutôt sur le ballast, à sa disposition, ce p’tit loup d’Alphonse a choisi celui avec des trains ! Qui l’eût cru ? Futur aiguilleur, contrôleur, chef de gare, conducteur de TGV ou que sais-je encore ! Son métier de demain prend peut-être forme, sinon voie (ferrée) ? Incroyable attirance de ce petit garçon vers tout ce qui ressemble à des rails ou des trains ! Il cheminera peut-être plus tard comme un cheminot (et non pas chemineau !) sur les chemins de fer et non pas de terre !

Ainsi, dans les bibliothèques, choisit-il toujours, des ouvrages représentant des trains ! Voyons donc ! C’est plus fort que lui.

Pauvres parents qui doivent se résoudre à jouer les équilibristes en se déplaçant dans leur maison ! En effet, elle se retrouve jonchée de trains miniatures, de locomotives et de rails à n’en plus finir ! Alphonse est un bâtisseur de voies ferrées. Il vous poserait le transsibérien et ses milliers de kilomètres, comme une interminable route de la soie qui se déclinerait en rails rectilignes et linéaires, fixés à travers les steppes d’Eurasie. En « route » pour Pékin !

En attendant, sur le tapis du salon, dans sa maison de Vendenheim, Alphonse architecte/concepteur concocte une nouvelle ligne.

Des idées plein la tête : elle fume – tiens donc ! – comme une locomotive à vapeur !

Et, petit coquin malin, si un jour il convole en justes noces, gageons que sa future épouse se prénommera Micheline !

Sera-t-elle guichetière dans la gare de son village à lui vendre un ticket composté pour la vie ? 

Les voies du destin sont souvent impénétrables comme des rails de voies ferrées. Il suffit de s’y laisser glisser –tout simplement – vers le bonheur.

Terminus où les panneaux d’affichage à palette, proposent une noria de départs et d’arrivées, faisant palpiter les cœurs suspendus, tels des lampions, sur les serpentins électriques des caténaires.

C’est ce qu’on appelle –tout simplement – un coup de foudre…

                                                                           ©Laurent BAYART 

14 mars 2021                                                                              

LIVRE / VOYAGE AU PAYS DE FRANKLIN DELANO ROOSEVELT.

Publié en 1934 chez Grasset, ce livre analyse l’Amérique du Président Roosevelt et cette révolution menée par ce descendant de migrant hollandais, devenu un protagoniste emblématique, et chantre du  New Deal (« Nouvelle donne »), dans la vie politique et publique des Etats-Unis.  32èmePrésident des States et seul à avoir été élu à quatre reprises ! Voyage intéressant et galeries de portraits où fourmillent chroniques et anecdotes sur les personnages clefs de sa politique. La couverture représente un aigle bleu, symbole de laNational Recovery Administration (NRA) qui avait pour but d’éliminer la « concurrence acharnée » en réunissant l’industrie, les travailleurs et le gouvernement pour créer des codes des «pratiques loyales» et des prix fixés.

Voilà pour une rapide explication de texte. L’auteur, Robert de Saint-Jean qui fut, quant à lui, écrivain et journaliste, compagnon de Julien Green, nous brosse une analyse intéressante et exhaustive d’une Amérique en embryon de grande puissance planétaire, à une époque où les réseaux sociaux n’existaient pas encore, la T.S.F. étant le grand média de communication : S’il choisissait de parler au microphone, il peut escompter que, d’après le recensement approximatif des postes et des auditeurs, cinquante-trois millions sept cent mille paires d’oreilles écouteront sa harangue. 

On y apprend la place prépondérante de la first lady surnommée Eleanor Je-suis-partout qui, lors d’un de ses déplacements officiels, fut surprise de n’apercevoir « aucun kodak » et de déclarer, vaguement dépitée, à la cantonade : Pourquoi les photographes ne viennent-ils pas ? On apprend qu’elle parlait parfaitement le français, tout comme son mari. Les anecdotes cocasses et drôles foisonnent. Ainsi, on raconte qu’après chaque réception  importante à la Maison Blanche, il manque toujours quelques serviettes et quelques cuillers. –Que faire, s’écria Mme Roosevelt, pour décourager ces amateurs de souvenirs ? Faut-il ne donner aux invités que des serviettes en papier, comme dans les cantines de l’Armée du Salut ?   Cette femme, qui semble posséder une grande humanité et empathie, avait même pris, un jour, la défense d’un homme qui avait volé pour venir en aide à sa famille affamée. Elle tira d’affaire cet individu en déclarant : Vous seriez bien méprisable, si vous ne voliez pas pour apporter du pain aux vôtres…

Intéressant aussi ce chapitre consacré à L’équipe de Roosevelt,  composée de fortes personnalités comme : Henry Agard Wallace (celui des fontaines à Paris ?), Miss Perkins, Borah qui a des idées toujours surprenantes, toujours tranchantes…qui déclara aussi : -Je ne crois pas à une guerre prochaine en Europe…/…mais je suis convaincu que la Ligues des Nations se montrerait complètement incapable d’empêcher une catastrophe. Lippmann considéré comme un augure par la grande majorité de ses compatriotes. Ajoutez à cette galerie, la personne atypique de Fiorello La Guardia, maire de New-York, qui contraria vivement l’ambassadeur d’Allemagne, car il détestait Hitler ! 

Enfin, au rayon des clichés, le chroniqueur de rappeler fort justement : Qu’on ne dise pas, sur l’autre bord de l’océan, que le Français est un monsieur qui part sans payer après avoir fait des histoires, qu’on ne murmure pas, de ce côté-ci, que tous les Américains ont à la place du cerveau une machine à calculer. Et de conclure, en parlant de l’Amérique : Ne bâtira-t-elle pas des villes plus démesurées que celles d’hier, plus hautes que New-York, plus démentes que Chicago ? Quels prodiges n’inventera-t-elle pas lorsqu’elle comptera cent cinquante, puis vers l’an 2000, deux cent millions d’hommes ?

L’histoire, qui est une page qui tourne très vite avec les aléas du temps, viendra apporter les réponses…                                                                                                                                                                                  

                                                           Copyright Laurent BAYART 

La vraie révolution de Roosevelt de Robert De Saint Jean, éditions Bernard Grasset, 1934.

BILLET D’HUMEUR / ACTE 156 / LES LEVRES INVISIBLES OU LES MASQUES SONT DEVENUS SOURDS…

         On n’y pense pas en ces temps bien compliqués où –coronavirus (des) oblige, les lèvres se voilent d’un masque impudique : on n’aperçoit plus la dactylographie de la lippe de nos contemporains. Et celui qui avait l’habitude de lire sur la bouche du quidam ne distingue qu’un rideau/écran blanc qui fait de chaque visage un Zorro sans son . Nous voilà privés de l’alphabet du visage et des paroles en version sous-titrées dictées par les lèvres.

Le monde nouveau est né…

Celui dont les oreilles sont des coquillages morts ou souffrants se retrouve victime de la « double peine » de ne pas bien saisir le message de l’autre, mais aussi de ne plus pouvoir déchiffrer ses paroles dissimulées par le masque salvateur, devenu l’armure souple anti-virus et protecteur.

Drôle de monde où l’on  cloisonne et enferme toujours plus ceux dont les oreilles sont se transformées en partitions sans notes.

Telles des cartes bancaires, nous voilà devenus sans contacts.

Et moi qui suis à la peine devant le cinéma muet des dialogues de…sourd, je finis par constater que je ne « m’entends » plus avec mes contemporains ! Dur de la feuille, on me rend une page blanche…en guise de conversation. 

Pour moi, vos yeux ne remplaceront jamais vos lèvres qui psalmodient le limon de vos paroles.

                                                                                Laurent BAYART

                                                                                     10 mars 2021

LIVRE / L’AMERIQUE DES ANNEES QUARANTE VISITEE PAR UN SOCIOLOGUE / UNE ANALYSE PASSIONNANTE DE CE NOUVEL ELDORADO.

         Encore une découverte vintage avec ce livre publié en 1940, signé par Didier Lazard, sociologue et écrivain. Ce « road trip » en trailer (caravane), 20.000 kilomètres en trois mois à travers l’Amérique de Roosevelt, se révèle être véritablement passionnant ! 

Pages jaunies et racornies, parfois à couper avec un couteau pour en ouvrir quelques feuillets, cet ouvrage, au titre anodin « Contrastes américains », raconte ce Nouveau Monde que l’on découvre encore – à l’époque – en paquebot. L’auteur raconte la jubilation des immigrants qui se sont dépouillés de leur passé…/…Leur mentalité a changé. Ils ont été des hommes neufs, à la conquête d’un pays neuf. Voyage à travers ce pays de contrastes,d’Est en Ouest et du Sud au Nord. Tel un anthropologue avisé, il décrit le monde de la presse, de la police, de l’univers carcéral,  de l’éducation et notamment des universités, les activités culturelles et sportives, les sciences, l’architecture…Bref, un scan didactique, comme une exploration de cette Amérique moderne, déjà en avance sur son siècle et sur le suivant, et qui a la bougeotte !

Analyse empirique avec ce constat : Très curieuse est, en effet, cette nostalgie des Etats-Unis pour la culture européenne à laquelle rien ne les rattache. Les Américains, ces déracinés avides d’un passé sous le poids duquel l’Europe croule…Edifiant aussi, les problématiques de l’époque (comme quoi, notre actualité contemporaine ne véhicule rien de nouveau !) avec l’assurance-vieillesse publiant un rapport qui traite du nombre de personnes au-dessus de soixante-cinq ans et la population globale des Etats-Unis (qui) a passé du simple au double. Bref, on parle déjà du vieillissement de la population et les spécialistes font déjà des projections jusqu’en 1980 !

Descriptions intéressantes du mode de fonctionnement et de l’historique de cette prestigieuse université qu’est Harvard  (fondée par John Harvard): Le Yard doit son nom au fait que des troupeaux de vaches y venaient paître, avant que la place ne soit envahie pas des troupeaux d’étudiants…

Et de New-York, on y apprend que dans cette ville étonnante l’on construit une école neuve tous les quinze jours…Quant à Pittsburgh, c’est la ville qui fait le plus de fumée des Etats-Unis.

Et, Didier Lazard de conclure, lyrique et poète utopiste, en voyant s’éloigner (dans le paquebot du retour) la statue de la Liberté : La liberté : c’était à la fois la raison historique des Etats-Unis, leur orgueil et leur foi. C’était le bien le plus cher au cœur d’un peuple entier. C’était la source de toutes les énergies et de toutes les richesses du passé, de toutes les craintes et de toutes les espérances de l’avenir.

Pendant ce temps-là, l’Europe était déjà assourdie par l’obscurantisme des bruits de bottes…

                                                                            © Laurent BAYART 

Contrastes américains de Didier Lazard, Calmann-Lévy, 1940.